MAX B & FRENCH MONTANA – Coke Wave

MAX B & FRENCH MONTANA – Coke Wave

Les ennemis de mes ennemis sont mes amis. C’est ce principe universel qui réunit Max B et French Montana. A la fin des années 2000, en effet, l’un et l’autre sont fâchés avec Jim Jones. Après avoir été la force motrice du collectif ByrdGang, le premier a rompu ses liens avec le rappeur des Diplomats, persuadé qu’il l’emberlificote. Et comme Karim Kharbouch, alias French Montana, entretient lui aussi une inimitié envers Jim Jones, il se rapproche de lui. En 2008, on les entend une première fois ensemble sur « Waavvy », un titre de la seconde mixtape de French, Live From Africa. Et quelques mois après, le duo sort un premier projet commun, une mixtape importante de la riche année 2009.

Coke Wave est une mixtape, car il ne peut en être autrement. Leur fâcherie avec l’influent clan Dipset leur vaut d’être blacklistés. A cause de cela, avant son interminable incarcération, Max B ne sort plus que des projets gratuits. Quant à French Montana, qui n’aura aucun album en bonne et due forme avant Excuse My French en 2013, il se cantonne aux DVD de la série Cocaine City, grâce auxquels il distribue dans la rue ses morceaux et freestyles. Sortie avec l’appui de DJ Whoo Kid, Coke Wave, dont le titre regroupe les termes fétiches des deux rappeurs (« cocaine » et « wavy »), est donc une suite naturelle pour French Montana et Max B. Cependant, elle est aussi un tournant dans leurs carrières.

Sur une bonne partie de la mixtape, ils détournent les morceaux des autres. Ils samplent 50 Cent sur « We Wavey », mais ils vont aussi bien au-delà du seul rap new-yorkais. Le « Can’t C Me » de 2Pac, morceau g-funk archétypal, devient « Smoking ». Le « Paper Planes » de M.I.A. se change en « All I Wanna ». Le « I Wan’t You » de Marvin Gaye se transforme en « I Warned You », le « Let’s Dance » de David Bowie en « Been Around », et puis le « Englishman In New York » de Sting devient le mémorable « We Run NY », un titre de plus dans la longue liste des hymnes à la Grosse Pomme.

Les deux rappeurs nous offrent aussi des originaux d’anthologie, comme la fantastique plage d’ouverture « Stake Sause ». Et tout du long, leurs styles se complètent à la perfection : tandis que French Montana adopte le ton brut et tranchant attendu du rappeur des rues, Max B opte pour ces chantonnements bancals qui sont sa marque de fabrique. Il mêle ses vantardises et ses histoires de drogue à un fond de mélancolie (l’ombre de la prison plane, déjà…), et ce contraste est amplifié parfois par la musique, comme avec le piano pathétique de Dame Grease sur « Goon Music ».

Coke Wave n’est pas seulement une bonne mixtape. Elle est un jalon, dans la carrière des deux hommes. Après elle, plus rien ne sera comme avant. Ils connaîtront cependant des destins inverses. Côtoyant les bonnes personnes (Diddy, Rick Ross, Waka Flocka Flame…), alimentant les news people (il subira des agressions qui feront du bien à sa street credibility, il fréquentera la rappeuse Trina, puis Khloé, l’une des Kardashian), French Montana entamera une irrésistible ascension vers la célébrité. Tandis que Max B croupira en prison, avec pour seule consolation de voir sa légende se répandre à l’extérieur, avec l’appui et le soutien constant de son fidèle compagnon de route.

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The Notorious S.Y.L.V.

The Notorious S.Y.L.V., a.k.a. Codotusylv, écrit sur le rap et tout un tas d'autres choses depuis la fin des années 90. Il fut le fondateur des sites culte Nu Skool et Hip-Hop Section, et un membre historique du webzine POPnews. Il a écrit quatre livres sur le rap (dont deux réédités en version enrichie), chez Le Mot et le Reste.

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