Quand un artiste important apparait, qu'il soit rappeur ou quoi que ce soit d'autre, le bon réflexe n'est pas d'attendre ses prochaines créations. Rien ne garantit jamais qu'elles soient à niveau. Rien ne dit qu'elles apporteront satisfaction. Non, la bonne démarche, c'est toujours de regarder avant. C'est d'en revenir aux origines, aux fondations, à ce qui l'a amené (ou amenée) à devenir une référence, à ces travaux d'antan où l'enthousiasme juvénile dominait sur les calculs commerciaux, à cette époque pas encore polluée par une couverture médiatique intéressée.
Cette couverture médiatique, Young Scooter n'en a bénéficié qu'un peu. Et jamais sa démarche n'a semblé guidée par un plan de carrière. Ces dix dernières années, le rappeur d'Atlanta n'a jamais fait que perpétuer la posture présentée sur Street Lottery, sa "mixtape" de référence. Il n'a fait que poursuivre son numéro de black migo. Et il a quelquefois délivré de de bonnes choses. Mais jamais, il n'a égalé ce classique de la trap music. Pour retrouver quelque chose qui s'en approche, il ne faut donc pas regarder après, mais avant, deux ans plus tôt, en 2011.
Sortie sous l'égide de DJ Swamp Izzo et de The Empire, Finessin' & Flexin' est sa première mixtape, et à cette époque, Young Scooter n'est que le sidekick d'un rappeur plus prometteur son ami d'enfance Future. Cette sortie le confirme. La superstar en devenir est présente sur un tiers des titres, et deux d'entre eux, "Rite" et "Annoying" (avec Waka Flocka en prime) figuraient déjà sur une de ses mixtapes, la prodigieuse True Story, apparue quelques mois plus tôt.
Ces deux morceaux sont fabuleux, et d'autres enregistrés en duo sont des tubes, "Flex Finesse", ainsi que "Clientele", qui prouve que Rick Ross n'était pas le seul à sortir des bangers à propos de Big Meech, à l'époque. Et si "Freebandz" est dispensable et générique à souhait, il présente une grosse progression par rapport au morceau homonyme que les deux mêmes, accompagnés du regretté Trouble, avaient délivré dès 2008, quand tous les trois étaient encore inconnus.
Mais il ne faudrait pas penser que Future est le seul à rendre cette mixtape intéressante. Il y a d'autres grands moments sur cette sortie dédiée pour l'essentiel au billet vert. Il y a de quoi se réjouir sur cette sortie gratuite marquée par un hédonisme sans queue ni tête à la Gucci Mane, par son humour joyeusement débile, comme quand Young Scooter déclare, sur "Paper Chase", qu'il a collecté tellement de billets qu'il entend parler les présidents morts imprimés dessus.
Cela est tout aussi extatique, quand le rappeur nous raconte sa "Black Migo Story", qu'il s'identifie au rappeur de Baton Rouge le plus influent de tous les temps ("Boosie") ou au président ("President") parce que, lui aussi, dort dans une maison blanche (de cocaïne), ou bien qu'il fasse part de son appétit insatiable (pour l'argent, pour le sexe…) sur "Can’t Get Enough".
"Can’t Get Enough"... Nous non plus, nous n'aurons jamais assez de cette trap music quintessentielle menée à un train d'enfer par l'un de ses plus éminents représentants.
PS : merci à Lex_lugor, de nous avoir recommandé cette vieille mixtape de Scooter.