Pendant ce temps, à Baton Rouge, Whop Bezzy a continué à dominer les débats dans l'ignorance absolue du reste du monde. Nous avons déjà dit ici tout le bien que l'on pensait de Addy World, l'une de ses sorties de 2019. Mais le rappeur, poussé aux avant-postes de la scène locale depuis le milieu de la décennie passée, ne s'est pas arrêté en si bon chemin.
L'année suivante, W.W.3 a valu tout autant le détour pour qui sait apprécier le vrai rap de la ville, celui qui, par-delà ses têtes d'affiche Kevin Gates et NBA YoungBoy, perpétue l'ambiance festive qui a toujours convenu à ses mauvais garçons. Il y a quelques années, sa signature chez Atlantic aurait pu amener Whop Bezzy à changer ses sons pour passer de l'échelle régionale à la nationale. Ses toutes dernières sorties, d'ailleurs, laissent entrevoir une telle évolution. Mais pendant longtemps, le rappeur n'a pas cédé à ces sirènes.
Sur cette "mixtape" de 2020, Whop Bezzy est fidèle à ses premières amours, à savoir cette formule consacrée à la fête, à la danse, à la drogue, au sexe et aux gros fessiers, cette musique bondissante, sautillante et syncopée qui fait plus de bruit que toutes les cymbales, du carnaval. Le rappeur parle des plaisirs de ceux qui en ont peu sur des morceaux exubérants où retentissent acclamations, onomatopées et interjections, où les refrains sont des phrases répétés comme des slogans, où son ad-lib "oh my god" rythme et souligne le propos.
Et dans la lignée du mélancolique et du pessismiste Boosie Badazz, à jamais le Dieu le Père du rap de Baton Rouge, Whop Bezzy se fend dans la seconde moitié de la mixtape, à partir du très bon "The Way I Came Up", de titres où il étale son vague-à-l'âme, où ce voyou allègre et dépravé parle de ces filles et de ces potes sur lesquels on ne peut pas compter.
Il fait tout cela à vive allure, sur des morceaux qui tournent autour des deux minutes, parcourus parfois de ces orgues dégoulinants et de ces simulacres de sifflets qui nous ramènent dans l'atmosphère moite des bordels et des bayous de Louisiane, dans l'air poisseux de ses nuits et de ses rues. Il le fait sans renfort, sinon celui sur "DeBo", de 70th Street Carlos, son habituel compère du Wreck N Crew.
C'est la guerre mondiale sur W.W.3. Cette sortie marque moins que Addy World, elle est moins constante, mais elle délivre son contingent de tubes quand Whop Bezzy dégaine une nouvelle ode à sa drogue de prédilection, ainsi qu'au percocet, sur l'enjoué "This Addy", quand résonnent les cloches et le synthé tournoyant de "Oppd Out", ou quand, à l'inverse, le rappeur expose ses frustrations sur "Tired".
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