C'est un disque sorti à la fin des années 90, et qui aurait dû se perdre dans les méandres du rap sudiste de l'époque. Le trio Critical Condition, en effet, est issu du fin fond des bayous de Louisiane. Merrick "Money" Young vient de la petite ville de Morgan City, ses deux compères Wilfred Lee Holmes (dit Will Chill) et Tech ont grandi dans la cité toute aussi modeste de Thibodaux, et cet album, leur deuxième ou troisième, selon les sources, est sorti sur l'obscur label Starvin Artists Entertainment (le nom ne s'invente pas…), basé à La Nouvelle-Orléans et géré par Money. Qui plus est, tous ses membres seront incarcérés plus tard, pour diverses raisons, ce qui ne les aidera évidemment pas à faire carrière.
Cependant, sur ce disque, un détail retient l'attention : CC Water Bound est appuyé par de grands noms de la production rap sudiste, Mo B. Dick de Beats By The Pound, et surtout Pimp C d'UGK. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que cela s'entend. Cet album est admirablement produit.
Pour habiller ce gangsta rap excessif typique de la Louisiane, les beatmakers ont mis les bouchées doubles. Secondés par les scratches du DJ de Lafayette Dolby D, ils jouent de sons qui sentent bon le vieux funk avec leurs guitares et leurs orgues bien poisseuses. Et ils n'ont pas peur de la mélodie, comme quand Mo B. Dick lui-même déploie son chant sur "CC Waterbound" et la romance porno de "All This Dick".
Au bout du compte, l'album regorge de moments mémorables, comme ce splendide "Bout 2 Go Down", décliné aussi sur le mode screwed and chopped, où Pimp C sublime une guitare issue d'un morceau de Curtis Mayfield, et où interviennent les raps de son camarade Bun B. Ou bien ce sample bien employé du "Numb" de Portishead sur "Hood Card". Ou encore la guitare de "Playa Haters". Et puis, in fine, le posse cut "4 Real Nigga Posse" avec les membres du collectif étendu de Critical Condition, Aldon X & Shorty.
Tout ici fait de CC Water Bound, avec son ambiance aussi moite que le climat suffocant de la Louisiane, un semi-classique perdu de ce qu'on appelait alors le Dirty South.
Fil des commentaires
Adresse de rétrolien : https://www.fakeforreal.net/index.php/trackback/3306