Son statut de grand du rap, Tauheed Epps le construit au début de la décennie, quand il sort coup sur coup plusieurs mixtapes d'anthologie. Parmi elles, figure Codeine Cowboy, et celle-ci a eu une importance encore plus particulière. C'est avec cette dernière, en effet, que Tity Boi devient 2 Chainz. Son nouveau nom fait alors son apparition en sous-titre, et après cela c'est sous cette appellation qu'il deviendra célèbre.
S'il vise le succès, si après avoir fait ses débuts au sein du duo Playaz Circle, dans l'ombre de Ludacris, il veut être connu d'un large public, il est plus prudent qu'il troque son ancien pseudo potache, pour un autre un peu plus passe-partout. Pari gagnant, puisqu'à partir de 2012 et de l'album T.R.U. Story, on le verra collaborer avec toute l'aristocratie du rap, qu'il s'agisse de Kanye West, de Nicki Minaj ou de Drake, sans oublier un Lil Wayne qu'il a déjà côtoyé sur les singles de Playaz Circle, leur tube "Duffle Bag Boy", et "Big Dawg".
Codeine Cowboy est aussi l'une des meilleures mixtapes de Tity Noi / 2 Chainz. Après deux autres déjà remarquées, Codeine Withdrawal et The Residue, les DJs Teknikz et Frank White se sont efforcés d'y réunir ses meilleurs titres. Soucieux de viser large, le rappeur et ses acolytes ménagent la chèvre et le chou, faisant à mi-parcours une pause avec les bangers trap music, au profit de moments suaves comme "Feeling You" avec son sample d'Alicia Keys, ou encore "Pimps", entonné sur la douce mélodie de "Summertime".
Tous ces morceaux, pour une bonne part, sont assistés par la crème de la production trap de l'époque : Drumma Boy, Lex Luger, Mike Will et Honorable C Note. Ils sont parfois accompagnés, en plus du vieux compère Dolla Boy, par quelques têtes d'affiche du rap, telles que Young Jeezy, Pusha T et Bun B, par des rappeurs de l'époque comme Cyhi the Prynce, Vado et Big K.R.I.T., et même par ce bon vieux Busta Rhymes. Et s'il n'est pas encore aux manettes de celle-ci (cela viendra avec la prochaine), le roi de la mixtape DJ Drama coopte lui aussi 2 Chainz le temps de quelques mots.
Tity Boy, donc, change de nom, le rappelant à tout bout de champ en criant ses légendaires "2 Chainz!!". Mais en vérité, il aurait pu le garder, le rappeur de College Park, dans la banlieue d'Atlanta, demeurant le même personnage jouasse et irrespectueux. Ses textes, sans queue ni tête, ne sont qu'une succession tourbillonnante et extatique de bons mots sur les thèmes de l'argent, des marques de luxe, et bien sûr, logiquement pour l'ancien "Garçon Nichon", des filles.
Le rappeur, qui connaît ses classiques, prend du plaisir à changer de vieux slogans du rap en histoires de drogue : le "what more can I say? Top billin'" d'Audio Two devient "what more can I say? I"m dealin'". Et quand il propose d'en donner au batteur, à la manière des Ultramagnetic MC's sur "Give The Drummer Some", c'est de dope dont il parle, sur un "Role Model" où il prétend que son idole est un dealer.
Et tout cela est jubilatoire, surtout dans ces temps forts que sont "Cowboy" avec son sample de Bon Jovi, l'exaltation insensée de la drogue de "Gasolean", des ego-trips corsés tels que "Goodnight", ce "Lo Bootz" addictif où il roule encore des mécaniques, la pure trap music de ce "Kitchen" calqué sur le "Hard In Da Paint" de Waka Flocka et produit par le même homme, Lex Luger, sans omettre "Spend It", que l'on retrouvera sur la mixtape suivante, T.R.U. REALigion.
Très prisée également, cette dernière sera le prélude à la carrière que l'on connaît. Toutefois c'est déjà ici, avec Codeine Cowboy, en aval du rap salace de son mentor Ludacris et de la trap music absurde de Gucci Mane, et en amont des élucubrations à venir de Migos et de PeeWee Longway, que 2 Chainz gagne sa place dans la fabuleuse histoire du rap.
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