Alors qu'il atteint la trentaine, Team Eastside Peezy est l'un des acteurs les plus satisfaisants et les plus productifs de la scène de Detroit. Non content d'avoir sorti Ballin Ain't A Crime début 2017, l'un des meilleurs projets issus de la Motor City en cette année faste, il a embrayé avec pas moins de trois mixtapes, People's Champ, Winter Grind et Ghetto Wave. Et puis, après s'être fait tirer dessus dans le cadre d'une guerre des gangs, il a remis le couvert en 2018, sans rien sacrifier de sa qualité puisque le court No Hooks a été, à son tour, l'une des sorties marquantes de l'année écoulée.
Faite de sept titres seulement, cette mixtape produite par K Money, The Realist Sounds et David Wesson est fidèle à son titre. Elle respecte le mot d'ordre proclamé sur la seconde plage : "Fuck A Hook". Peezy, en effet, refuse de se plier au rituel du refrain. Et c'est en partie ce qui garantit son succès.
Car quoi de mieux, pour convenir au rap rapide et sans répit de Detroit, pour accompagner ces notes de piano insistantes et ces synthés de haute volée, que des textes sans pause, eux aussi ? D'entrée, dès le brillant "I’m Good Pt.5", Peezy nous assaille avec son rap de rue, il nous inonde dans un flot de paroles, seul, sans l'appui d'aucun autre. Les mots, comme la musique, sentent le drame. Ils sont délivrés sous tension.
Hormis "30 a Week", une conclusion lente au phrasé fatigué, chaque plage de No Hooks se révèle rude et implacable. Tous les vers sont assénés de la même façon, avec un goût certain pour l'anaphore, de manière presque hypnotique, comme avec ce "Back End" saisissant où Peezy énumère le prix de chaque chose qui compte (bijoux, drogue, etc...).
De cette façon, le rappeur s'emploie à nous faire goûter la pression ("Pressure", s'intitule justement l'un des meilleurs titres) ressentie au quotidien par le dealer et par le criminel. Il évoque une vie de gang intense, menée à cent à l'heure, sans perte de temps, ni joliesse inutile. Cela ne plaisante pas. Cela va droit au but. Et cela est tout bonnement jouissif.
Fil des commentaires