En propagateurs d'une musique juvénile, en leur qualité de créatures lancées par le producteur pygmalion Mike Will Made It, Swae Lee et Slim Jxmmi avaient tout, en 2014 et 2015, pour n'être qu'une folie passagère. Mais au réjouissant SremmLife, a succédé SremmLife 2 ; après les déflagrations "No Flex Zone" et "No Type", a suivi "Black Beatles", leur collaboration avec Gucci Mane, et leur premier single numéro un aux Etats-Unis. Le succès durable et considérable rencontré par les deux frères a donc chassé, en 2016, cette impression de fugacité qui avait dominé jusque là, et qui avait valu au duo de bien stupides procès en futilité.
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Les deux frères de Rae Sremmurd aiment pourtant toujours faire la fête. Ca reste leur thème principal. Le premier morceau de l'album, d'ailleurs, s'intitule "Start a Party". On peut difficilement faire plus clair. Et d'autres titres enfoncent le clou, comme ce "Set the Roof" qui consolide plusieurs générations de party rap, étant produit par deux spécialistes du genre (Mike Will, bien sûr, et le maître du style ratchet californien, DJ Mustard), ressuscitant la vieille gloire du crunk Lil Jon, et étant, probablement, une allusion à l'incandescent tube old school "The Roof Is on Fire". Toujours dans la même lignée, toujours accompagné d'un vieux fêtard invétéré, Juicy J, "Shake it Fast" joue quant lui le rôle d'hymne pour strip club. Swae Lee, aussi, s'adonne comme jamais à des raps et des cris hystériques.
Et pourtant, ces moments exubérants ne sont plus ceux que l'on retient sur cet autre StremmLife, qui se montre bien plus calme et moins frénétique que son prédécesseur. Dès après "Start a Party" surgit en effet un "Real Chill", avec la valeur montante Kodak Black, dont la musique est au diapason du titre : atmosphérique et ralentie. Même les singles sont ainsi, "By Chance" par exemple, un titre marmonné davantage que rappé, le lent et l'aérien "Look Alive", et "Black Beatles" lui-même, avec ses faux airs de synth pop et ses petits chants évaporés.
Même quand Rae Sremmurd est au sommet de son épicurisme mâtiné d'absurde, sur le titre "Do Yoga", la mélodie se fait toute douce. Le duo se fait même contemplatif sur "Came a Long Way", quand il nous parle du chemin qu'il a accompli, et il prend la posture de l'amoureux triste et transi sur "Now That I Know" et "Take It or Leave It", s'aventurant dangereusement sur le territoire de Drake. Cet album va si loin dans cette direction que sa version deluxe a cru bon de rajouter des titres comme "Over Here", davantage dans l'esprit du premier.
La diversité de ce second album, le rythme plus posé des deux frères, la tournure introspective de certains passages, lui ont valu d'être jugé plus accompli, mature et substantiel que celui d'avant. Mais en fait, il n'y a ni progrès, ni déclin. Quoique différents, les deux SremmLife se valent. C'est le regard sur le duo qui évolue, c'est son acceptation. Swae Lee et Slim Jxmmi étant devenus incontournables, un discours de légitimation s'est développé autour d'eux. Mais il ne faut pas s'y fier. Car en vérité, qui trouverait un intérêt à ce que Rae Sremmurd devienne mature ?
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