Plusieurs fois, Master P a tenté de relancer l'épopée No Limit, le label grâce auquel il est devenu le héraut du Sud, en ces années 90 où le rap de cet endroit là était encore confiné à la marge. Il y eut d'abord un New No Limit, puis un Guttar Music, et donc, enfin, No Limit Forever. Ce dernier redémarrage de la carrière rap de Percy Miller semble avoir été le bon, à en juger par la sortie en rafale, en 2015 et 2016, de mixtapes de Money Mafia, Ace B, She Money, BlaqNmilD, du propre fils de l'intéressé, Maserati Rome, et d'autres encore. Mais avant que le rappeur et son label n'atteignent une telle vitesse de croisière, il y eut une année décisive, 2013.
No Limit Forever :: 2013 :: télécharger la mixtape
Dès janvier et février, deux mixtapes avaient braqué les projecteurs sur Master P : le solo Al Capone, et puis le New World Order du Louie V Mob, un trio formé par le vétéran avec deux rappeurs très actuels, Alley Boy, d'Atlanta, et Fat Trel, de Washington DC, qui payaient ainsi leur tribut à leur modèle. Une autre allait suivre, en août, intitulée Famous Again, annonçant la sortie du projet officiel The Gift. Et elle valait largement les deux précédentes, tant son format se rapprochait de celui d'un album : d'abord, par la présence d'un long cortège d'invités, dont des grandes figures du rap comme The Game, Chris Brown, Wiz Khalifa, Tyga, Problem ou Chief Keef ; ensuite, par la qualité de la production, et le nombre de tubes.
Master P y trouvait le ton juste : malgré son âge, le quadra rappait avec envie, avec la démesure d'un Rick Ross, dès "Yea I'm Rich", une entrée en matière où il éclipsait la prestation de son fils. Il jouait avec brio le numéro du rappeur sûr de lui, satisfait de sa réussite ("Woke Up A Millionaire") et avide de luxe, du Louis Vuitton en premier lieu. Il proposait des hymnes insolents, comme "I Need an Armored Truck", "Streets Keep Calling Me" et "You Talk", avec les sons trap de son temps, et avec des techniques de flow contemporaines. Et pourtant, il ne donnait jamais le sentiment de courir après les jeunes. Non, c'étaient eux qui couraient après lui, à en juger par le nombre de rappeurs récents qui l'accompagnaient.
Master P prenait aussi la posture du vieux sage, sur "You Need to Know". Mais plutôt que de jouer au daron moralisateur, il y distillait des conseils de bon sens, pour prévenir les nouvelles pousses des pièges de l'industrie de la musique. Les mauvaises habitudes héritées de No Limit, certes, ne disparaissaient pas (la mixtape était pleine à ras-bord, et elle aurait mérité d'être expurgée de plusieurs morceaux). Mais le plus souvent, ça sonnait juste. Ca collait, ça tombait sous le sens. C'était le cas des tubes trap susmentionnés, du puissant "Makes You Stronger" à guitare, d'un "Freedom" aux accents soul, et même de "All Of Em", le morceau R&B syndical. Alors, Master P en 2013, famous again ? Célèbre à nouveau ? Oui, peut-être. Mais d'abord et surtout, plus pertinent que jamais.
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