Le rappeur de Memphis qui a le mieux tiré son épingle du jeu est Juicy J. Il est devenu le visage de sa ville. Il a tiré profit de l'épopée de Three 6 Mafia et s'est lancé dans une carrière solo à portée de vue du grand public. Cependant, s'il faut en retenir un autre pour la constance de sa carrière, poursuivie vaille que vaille, de label en label, malgré plusieurs détours en prison, c'est à son frère Patrick qu'il faut s'intéresser.
Depuis les années 1998-2000 et sa participation au single "Sippin' On Some Sizzurp" du groupe de son frère, Project Pat n'a cessé de sortir des disques et mixtapes a minima intéressants, jusqu'à ce jour d'avril 2015 où, à 42 ans, il a proposé une suite à Mista Dont Play, son grand album de référence.
Sorti chez Taylor Gang Records, le label de Wiz Khalifa, cet autre Mista Dont Play, sous-titré Everythangs Money (c'était Everythangs Workin' pour le précédent), souligne la persévérance de Project Pat. Formellement, rien ne sépare ce disque ce ceux d'avant. Il recycle d'ailleurs quelques extraits de ses mixtapes passées. En bon artisan de la musique, Project Pat s'ingénie à toujours confectionner le même produit.
Il emploie les thèmes de base du rap sudiste, drogue ("I Like To Smokeaaa", "Wanna Get High"), sexe ("Twerk It", avec Wiz Khalifa, Wale et Ty Dolla Sign), argent ("Trying To Get A Dollar") et violence ("Gooned Up", "I Ain't Payem Shit", "Crash Out)". Le rappeur use aussi de petites mélodies synthétiques stéréotypées, produites principalement par Lil Awree, et il joue de sa signature vocale, cette dernière syllabe accentuée, avec une telle fréquence que cela en est irritant.
C'est du gangsta rap en pilotage automatique, mais du gangsta rap honnête, si on peut dire. La posture est prétentieuse, mais la musique, elle, est sans prétention. Néanmoins, elle donne lieu à quelques hymnes comme "Pull A Move", "Gucci Skully" avec King Ray, "Never Be A G" avec Juicy J et le regretté Doe B, et le conclusif "Makin' Plays". Et d'autres passages encore sont à retenir, comme cette ode aux narcotiques qu'est "I Like To Smokeaaa", ce "Leave Me Alone" à la misogynie ultime, de même que le paranoïaque "Suspect".
Le premier Mista Dont Play avait connu un succès considérable. S'écoulant à plus d'un million d'exemplaires, il avait été l'un des albums les mieux vendus du label Hypnotize Minds. Il est toutefois peu probable que cette suite rencontre le même succès. Et pourtant, cela serait juste rétribution, au vu de la persistance inébranlable de Project Pat.
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