Fin 2014, alors que Future et sa bande sont aux Emirats, en route pour un weekend prestige autour du Grand Prix d'Abou Dhabi, DJ Esco est arrêté à l'aéroport de Dubaï en possession de quelques grammes de marijuana. Comme on ne rigole pas avec la drogue, en ces pays-là, il est expédié en prison et il n'en sort que 56 nuits plus tard, en janvier 2015. Quelques semaines après sa libération, sa première mixtape depuis son incarcération est nommée 56 Nights, en référence à cet épisode désagréable. Cependant, s'il y est bien question de tourments personnels, ce nouveau projet sorti avec Future ne parle pas de l'expérience de DJ Esco. Le rappeur, au contraire, s'exprime une fois encore sur ses propres troubles émotionnels, sur cet ultime volet de la trilogie de mixtapes qu'il a sorties après Honest et sa rupture avec Ciara.
On connait la chanson. Future l'a déjà déclinée sur Monster et sur Beast Mode. A nouveau, sur ce projet de dix petits morceaux, il poursuit sa thérapie d'un genre particulier, noyant son chagrin d'amour dans la débauche et les excès. Sur 56 Nights, le rappeur nous parle de fuite dans un sexe sans affection, désincarné, et plus encore, d'évasion par la drogue, avec ce chanté-rappé caractéristique dont il est l'un des grands propagateurs. Le troisième volet de sa trilogie se distingue pourtant du précédent, marqué par la production relevée de Zaytoven. Sur celui-ci, au contraire, dont les sons sont signés par la 808 Mafia, principalement représentée par Southside, le ton est moins triomphal, la musique plus atmosphérique, voire décharnée (écoutez donc "Purple Comin In" et "Now"). Ses contours sont plus indécis, ses accroches moins évidentes. Et cette impression est renforcée par des raps parfois marmonnés, voire rentrés.
Cette noirceur prend des formes distinctes, celle des éloquents chœurs funèbres de "Diamonds From Africa", où Future partage un soupçon de conscience sociale, celle du synthé strident et minimaliste de "No Compadre", des sirènes, des basses et des nappes de "Trap Niggas" (un titre si bon qu'il sera recyclé sur l'album qui suivra, DS2), ou bien du piano triste de la sompteuse conclusion, l'éponyme "56 Nights". Une seule plage, plus lumineuse, rompt avec la forme rugueuse de cette mixtape, la seule produite par un autre que Southside (à savoir Tarentino). Ce titre, qui s'accommode autant des saillies misogynes usuelles que d'allusions à la violence policière, c'est "March Madness", l'exception qui confirme la règle, mais aussi le morceau pivot de ce troisième tir gagnant du rappeur le plus important de notre temps.
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