Depuis quelques temps, un rappeur marche sur l'eau et personne ne le remarque, si ce n'est quelques sites spécialisés, notamment ici en France. En activité depuis 15 ans sur la prolifique scène rap de la Baie de San Francisco, ayant déjà à son actif une discographie honorable, A-Wax enfile perle sur perle. Il est l'auteur d'une des grandes mixtapes de 2013, Jesus Malverde. Il a proposé en 2014 ce qui pourrait être l'album de l'année, Pullin' Strings. Et il récidive cet été avec EverLasting Money. Aaron Doppie, de son vrai nom, est si inspiré que même sur un projet annexe comme la mixtape Everybody Loves Me Chapter 2, il ne peut s'empêcher d'être bon.
Présenté comme la suite d'un projet datant de 2012, ce second chapitre a tout d'une mixtape, et rien de la consistance ni de la finition d'un Pullin' Strings sorti quelques mois plus tôt. Alors que ce dernier ne comptait aucun invité, plusieurs chanteurs ou rappeurs participent à cette sortie, à peu près tous méconnus au-dehors de la Californie, à l'exception de la star originelle de la Baie, Too $hort, de Smigg Dirtee, et de Frenchie, le cousin de Waka Flocka Flame. Alors que l'album précédent avait une orientation très cloud rap, et qu'il était marqué par les mélodies et par la mélancolie, Everybody Loves Me 2 se montre sensiblement plus composite.
Comme sur l'album précédent, on trouve des nappes serties de guitares, par exemple sur "Dab Nabit", ainsi que des instrumentaux doux et ouatés ("Over Qualified"). Mais sur cette mixtape, on découvre également des virées dans la trap music comme "FYM", des moments R&B tels que "Stage Lights" avec le chanteur Luke Bingham, ou encore "Work For It" avec P. Child, de gros synthés gothiques et menaçants sur "Run Down" et "Rain" (agrémentés éventuellement d'une sirène sur le très bon "Crocodile Dundee"), une bizarrerie électronique avec "If I Wanna", une énième relecture du "OG Bobby Johnson" de Que avec "Stretched Out", et "Told Me", le titre avec Too $hort, qui ressemble, pour partie tout du moins, à un vieux titre de ce dernier.
Le seul liant sur Everybody Loves Me Chapter 2, c'est en fait le retour pour A-Wax à une formule plus irrévérencieuse et plus agressive que sur le déprimé Pullin' Strings, avec des histoires de drogue et des envolées sexistes qui s'inscrivent dans la longue tradition de la Bay Area, dès ce "Stretched Out" qui ouvre la mixtape. Ce second chapitre d'Everybody Loves Me est au fond, pour A-Wax, le retour à un certain ordinaire gangsta à la mode de la Baie. Mais avec ce rappeur là, grâce à des titres de l'acabit de "Stretched Down", "Run Down", "Neva Been", "Crocodile Dundee" et "Goin' Hard", même l'ordinaire est fait de grands moments.
Fil des commentaires
Adresse de rétrolien : https://www.fakeforreal.net/index.php/trackback/2319