Comme l'indique le nom de leur dernière mixtape, les Doughboyz Cashout (ou DBCO) ne sont pas nés d'hier. Ce volume est bel et bien le quatrième d'une série, We Run The City, lancée en 2009. Mais ça n'est qu'en 2013 que ce quartet (oui, je sais, ils sont cinq sur la pochette) s'est fait connaître au-delà de ses bases, quand Jeezy les a accueillis sur son label CTE, et qu'il a conçu avec eux (et avec YG, un autre des rappeurs en vue du moment avec son album My Krazy Life) la mixtape Boss Yo Life Up Gang. En 2014, tout était donc réuni pour que cette dernière sortie bénéficie d'une exposition inédite, d'autant plus qu'elle s'avère tout à fait réussie.
La ville que disent diriger les Doughboyz Cashout, c'est Detroit. Le collectif y est apparu en 2006, avec la fusion de deux groupes issus de lycées différents, mais adeptes de la même posture de m'as-tu-vu, les Doughboyz et les Cashout Rich Niggas. Bien ancrés dans leur ville, où ils profitent depuis plusieurs années d'une certaine cote d'amour, Payroll, HBK, Doughboy Quis et Doughboy Dre, n'en représentent pas moins le rap postmoderne et post-géographique de notre époque : leurs références, en effet, viennent d'un autre lieu et d'un autre temps. Comme l'indique le style Pen & Pixel de leur pochette, c'est vers la Nouvelle-Orléans et le No Limit de la fin des années 90 qu'ils ont rivé leur regard.
Sur We Run The City 4, c'est ce que démontrent ce son vintage à la Beats By the Pound, ces beats synthétiques et sautillants conçus par le seul Payroll, et ce gangsta rap de branleurs en pilotage automatique qui caractérise les paroles des Doughboyz Cashout. Celles-ci se montrent plus proches du rap bling-bling de parvenu d'autrefois que de la trap music d'aujourd'hui, avec ses descriptions de jungle urbaine ("City of Dealers", "My Young Niggaz"), avec ses pulsions sexuelles animales ("Pound Her Out"), avec son obsession pour l'argent et pour les autres signes extérieurs de richesse, un sujet au centre de la plupart des titres, plutôt que la drogue.
L'originalité n'est pas le fort du quartet, ni dans les sons, ni dans les flows, ni dans les textes. Ces rappeurs ne se distinguent pas non plus par une virtuosité débordante, et aucun titre ne se démarque. Et pourtant, parce que cette mixtape est homogène et consistante, et en attendant de voir ce que donnera leur association avec Jeezy, on s'y sent bien.
PS : merci à Héra, sans qui je serais passé à côté de tout cela.
Mais de rien mon cher. En fait cette mixtape reprend les codes No Limit vintage un peu comme d'autres essaient de faire revivre les trucs devil shit de Memphis. Je pense que c'est symptomatique d'une certaine "maturité" du rap en tant que genre musical. La porte est ouverte aujourd'hui au "rap de genre".