Ainsi en a-t-il été de No Limit. En dépit de son succès commercial, le label de Master P n'a eu aucune considération critique, en tout cas pas à l'époque de sa gloire. Ses préoccupations artistiques étaient si faibles, que ce qui pourrait bien être le meilleur album de son meilleur artiste, ironie du sort, est sorti chez un autre. Après avoir évolué avec les deux labels, c’est en effet sous l’étiquette exclusive de Jive Records que Mystikal propose en 2000 le disque de la consécration.
Malgré sa pochette "ce thug est très méchant et il va foutre le feu" d’un kitsch typiquement sudiste, en dépit aussi de titres ghetto comme un brutal "Murderer III" (où il revient sur l'assassinat de sa sœur) et un "Ain't Gonna See Tomorrow" pessimiste et imprégné de religiosité, malgré la présence des Medicine Men, les anciens Beats By The Pound, l’équipe de production de No Limit, Mystikal s’affranchit de plus en plus de son ancien label. Il affirme plus que jamais son identité à part : celle de James Brown pour le XXIème siècle.
La parenté avec le Godfather of Soul est criante sur l’un des singles les plus retentissants de l’année 2000, un "Shake Ya Ass" absolument irrésistible produit par les Neptunes (et réintitulé "Shake It Fast" pour le grand public). Le rappeur de la Nouvelle-Orléans partage avec son vénérable prédécesseur une voix rugueuse portée sur les cris et les exclamations, une énergie sans limite, un caractère remuant et, comme l’indique le titre susnommé, de fortes envies de remuer le popotin, et d’inviter les gangsters à terroriser les dancefloors.
Tout l’album est ainsi, survolté, ou fiévreux, pour paraphraser le titre de cet excellent "Mystikal Fever" tout en synthétiseur, en clavecin et en "oh oh" entrainants. Mais il a aussi ce qu’il faut de diversité pour être digeste. "Danger", l’autre single, aussi craquant que le premier, est agrémenté d'un chant délicieusement pop entonné par Nivea, de même que "Family". Sur "I Rock, I Roll", Mystikal démontre qu’il a toute la hargne d’un rockeur. Et sur "Come See About Me", la rappeuse Da Brat vient se mesurer à notre thug, éclipsant pour quelques moments sa voix abrasive, énervée et en rut.
D’autres invités épicent le tout, Petey Pablo, sur le même morceau et sur un bonus track qui révèle des extraits de son futur album, et Outkast, sur un "Neck Uv Da Woods" qui ressemble davantage à un de leurs titres qu’à du Mystikal.
Par cette variété, par cette forme électrique, et à d’indigents "Big Truck Boys", "The Braids" et "Smoked Out" près, Let’s Get Ready maintient le rythme sur la longueur. Et cela, une sortie chez le seul No Limit ne l’aurait peut-être pas permis.
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