L'année 2011 a été celle de G-Side. Le duo de Huntsville, Alabama, a sorti en effet deux projets tout à fait remarquables l'an passé, The One... Cohesive dès le 1er janvier, puis iSLAND, en novembre. Certains se sont étripés pour déterminer lequel était le meilleur, ce qui est logique, tant il est difficile de départager deux albums qui, s'ils n'évitent pas tout à fait le remplissage et les longueurs, s'inscrivent déjà parmi les incontournables du début de la nouvelle décennie.
La comparaison est d'autant plus facile que les formats sont proches. Au programme d'iSLAND, comme de son prédécesseur, il y a ces sons atmosphériques pondus par les Block Beataz. Il y a ces beats cinématiques, pour paraphraser le deuxième titre de l'album ("Cinematic"), lesquels relèvent du cloud rap, pour reprendre un terme de saison en 2011.
Les nappes de synthé dominent à nouveau sur des titres tels que "24 Eight" et "Luv 2 Hustle". Des notes électroniques sans rythme ouvrent "Recognize". On entend des chœurs d'enfants vaporeux en plus des scratches sur "Cinematic", un saxophone ouaté sur "Cast Away" et, sur ce titre comme sur d'autres, la voix feutrée de la chanteuse Joi Tiffany. Et l'on y surprend encore un emprunt réussi à un groupe indie rock ; pas Beach House, cette fois, mais les Australiens de Tame Impala, dont le "Why Won't You Make Up Your Mind?" sert de base à "Gettin' It", voire est transcendé par ce titre.
Niveau contenu, c'est également la même chose : en contraste avec ces beats psychédéliques et aériens, ST et Clova remuent le vieux fond thématique du gangsta rap ("I'm gangsta, I'm not emo", entend-on sur "Shots"), mais avec une maturité et une résignation peu habituelles, à en juger par les moments les plus puissants de l'album, l'intime et le très sombre "Our Thing", et un morceau intitulé bravement "Luv 2 Hustle", et néanmoins rempli d'amertume.
Dès l'introduction, le duo partage à nouveau sa philosophie. Il est question de ce principe du "slow motion" déjà explicité sur The One… Cohesive : construire sa carrière patiemment, se ménager une île à soi, et en faire à terme, à force de persévérance, une nouvelle nation. Joignant le geste à la parole, les deux rappeurs et les Block Beataz poursuivent donc leur route, ils creusent infatigablement leur sillon, tout droit, ne sortant rien d'autre que des albums ou mixtapes solides.
Merci beaucoup pour cette critique et cette découverte. Je serais passé complètement à côté.
Du très bon son.