20 odd years… En effet, elles ont été bizarres ces vingt années de carrière que célèbre aujourd'hui Buck 65. Erratiques, inattendues, surprenantes, pleines de détours et de demi-tours. Tenez, par exemple, on ne savait plus trop bien où le rappeur canadien en était avec Warner Music. Il n’y avait plus grand trace de ses relations avec la major depuis le milieu des années 2000 et Secret House Against the World.
Notre homme préférait multiplier les side projects à droite ou à gauche, comme ce Situation sorti chez Sage Francis, comme l’aventure électronique de Bike for Three et ce More Heart than Brain qui a marqué son retour chez Anticon, comme ce mix, Strong Arm, distribué à partir de son site, ou comme ce Dirtbike fleuve en trois parties, gratuit aussi.
Sur 20 Odd Years, Stinkin’ Rich ne rompt pas tout à fait avec son goût du bricolage et du concept. Avant d’être regroupé sur album, l’essentiel de cette sortie a été distribué au cours des mois derniers via une série de quatre EPs. Pourtant, c’est bel et bien un disque de major qu'il nous propose cette fois. Pas des bidouillages, mais un enregistrement propre et maîtrisé, à même de conquérir le grand public, voire le très grand public. Et bien sûr, de susciter déception, circonspection ou indifférence chez certains vieux fans.
Tout semble fait pour séduire sur ce qui se présente comme une succession de duos avec, en majorité, des compatriotes du Canadien. Avec aussi, côté français, la participation de la chanteuse Olivia Ruiz, avec laquelle Buck 65 a déjà collaboré, et qui se revendique fan du bonhomme (qui l’en blâmera ?). Dominent donc de jolies mélodies, de belles voix féminines et cette instrumentation pop rock que privilégie Buck 65 quand il est chez Warner ; même si, cette fois, il se remet à rapper, et qu’il mâtine sa mixture d’électronique.
Buck 65 connaît trop les dangers de la musique de masse pour y sombrer (cf. les paroles de "Superstars Don’t Love"). On regrettera pourtant des moments à la limite du mauvais goût, comme ce "Stop" enjoué et synthétique avec Hannah Georgas, ce "Final Approach" conclusif avec Marie-Pierre Arthur, et puis ce "Tears of Your Heart", avec Olivia Ruiz.
Ceux qui préfèrent le Buck 65 facétieux auront toutefois des "Zombie Delight", "BCC" et "Lights Out" à se mettre sous la dent. Des plages, au choix, gentiment fantaisistes, ou légèrement superflues. Et pour ceux qui l’aiment sensible, fragile et mélancolique, il reste l’americana rap de "Whispers of the Waves" avec Gord Downie, le contemplatif "She Said Yes", et les trois collaborations avec Jenn Grant : les délicates cordes de "Paper Airplane", "Cold Steel Drum" et une reprise du "Who By Fire" de Leonard Cohen, toutes plutôt classieuses.
Notre homme a fait bien mieux par le passé. 20 Odd Years, toutefois, est un album à découvrir. Car aux commandes, c’est toujours cet artiste à l’inventivité incontestable, celui qui a retenu du hip-hop cet art du collage, ce brassage des musiques et des références culturelles, cette capacité à trouver le beat qui fait mouche, et qui a su les exporter dans d’autres contextes. C’est la même personne, avec tout juste plus de moyens. Et même si Buck 65 flirte ici avec la variété, une comme ça, honnêtement, on en demande tous les jours.
yes, pas un grand Buck 65 mais un bon Buck 65. je l'ai chroniqué également ça sera en ligne d'ici quelques jours on se rejoint sur la plupart des points