En 2002, cela fait déjà plusieurs années que Peanuts & Corn sort avec une grande régularité de véritables petits chefs d'oeuvre de rap indé. Pourtant, depuis le fondateur The Ethics EP, et si l'on excepte le side-project instrumental Billy's Vision, l'animateur du précieux label canadien n'a plus donné suite à sa carrière solo, préférant se fondre dans des projets collectifs ou évoluer à l'arrière-plan, dans le rôle décisif mais discret du producteur. Il faut attendre encore une année pour que sorte Disenfranchised, un premier album à la hauteur des espérances les plus grandes. Au préalable, quelques mois plus tôt, Mcenroe a pourtant sorti un EP qui s'est avéré un peu plus qu'un simple amuse-gueule.
Moins personnel que ne le sera l'album, notamment parce qu'il partage la vedette avec quatre autres (Josh Martinez, Pip Skid, John Smith, Birdapres), The Convenience dévoile la face engagée de Mcenroe. On pourrait lui reprocher ses thèmes convenus, cette bonne conscience gaucho-poujadiste qui le conduit à se lamenter sur la mort du petit commerce ("Corner Store") ou à s'en prendre au "système" ("Ahm The System"), au monde des affaires ("Safety In Numbers") et aux dealers ("6.25 At The First Window"), en reprenant le mot d'ordre ironique de son groupe punk rock fétiche, les Dead Kennedys ("Give Me Convenience"). Toutefois, le propos est toujours juste et nuancé, Mcenroe préférant la finesse du commentaire social aux facilités du slogan.
Et puis surtout, une fois de plus, il y a la qualité de la production. Certes, elle n'a pas encore l'accessibilité de Disenfranchised, elle n'est pas encore à même en mesure de séduire au-delà du rap. Pour le constater, il n'y a qu'à comparer la version dépouillée de "Give Me Convenience" à celle, plus luxuriante, qui figurera sur l'album. Mais des détails exotiques (l'instrumental oriental "Give Me Convenience", le violon de "24 hours", la harpe de "Safety in Numbers"), des percussions sophistiquées, des ambiances subtiles ("You Win"), des variations infimes mais décisives ("Ahm The System") confirment l'excellence de Mcenroe. Même sur ce disque présenté comme anecdotique, il prouve encore qu'il est l'un des beatmakers les plus fins qu'ait engendré ce hip-hop là. Non, tout le hip-hop, toutes tendances confondues.
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