Le premier album solo d'Aamir confirme tout ce qu'il faut penser depuis toujours sur les Escape Artists : ce groupe californien a beau se placer au centre de ce qu'il reste de la scène rap indé et être un modèle de constance, d'activisme et de sincérité, il n'y a jamais rien eu à dire de renversant sur sa musique. Elle ne s'expose certes à aucun reproche, mais elle ne mérite aussi aucune louange.
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Il n'y a jamais grand chose à dire à propos des Escape Artists. Alors, jusqu'ici, nous n'avons pas parlé plus que ça de ce groupe californien, si ce n'est un article de mon collègue Ash Boltagone publié sur une précédente incarnation de ce site. Il y a pourtant une injustice à passer ces gens sous silence. Leurs albums sont globalement bons, et leurs membres sont depuis de nombreuses années des activistes importants du rap indé. Ils comptent même parmi ses ultimes animateurs, comme le montre ce premier album solo d'Aamir Yusuf, modèle de maturité et de contrôle, de rap propre et maîtrisé, où se côtoient ni plus ni moins que le project-blowedien Ellay Khule, Nomar Slevik et Moshe de la scène du Maine, K-the-i???, 2Mex, le canadien Factor et Bigg Jus de Company Flow, entre autres.
Irréprochable, immaculé, constant, ce sombre et intimiste Underwater Regions s'écoute facilement, mais sans laisser la moindre impression. C'est fluide, ça coule tout seul, le type rappe bien, mais c'est absolument transparent. Le comble, c'est que la diversité des sons, des producteurs et des rappeurs n'apporte aucune surprise, qu'elle ne bouscule en rien la relative homogénéité de l'ensemble. C'est du rap adulte et underground sans sex appeal et sans humour, du hip-hop de Mormon qui prolonge celui déjà très policé du Common de "I Used to Love H.E.R".
D'ailleurs, cherchez, vous verrez bien, personne ne parle de cet Underwater Region. Ah si, il y a bien cette chronique rédigée chez nos amis de Hiphopcore. Mais lisez, et vous verrez que ce bon vieux Newton a dû se plier en quatre pour pondre quelque chose, et que son article, qui brode autour du titre ou qui retrace le parcours de l'auteur, remplit, délaye, gagne du temps, mais ne dit absolument rien du disque. Tout comme ce présent texte, d'ailleurs. Parce que le rap lisse d'Aamir n'offre aucune aspérité, il ne laisse aucune accroche à la critique. Car sur les Escape Artists, une nouvelle fois, et quels que soient les efforts et l'imagination déployés, il n'y a jamais eu rien à dire, ni reproches, mais aussi ni louanges.
Je rebondis sur une autre remarque : la constance est une qualité de plus en plus rare. A croire que certains sortent un album extraordinaire suite à un coup de chance pour enchaîner après de la bonne daube (ceci dit, les E.A. ne sont pas un modèle de présence ininterrompue dans les bacs, je te l'accorde).