"Musicalement, je pense que Qwel a la capacité de faire des choses très différentes avec des tas de producteurs". Voilà ce que nous confiait Maker en 2005 dans une interview. Et en effet, le rappeur chicagoan s’est essayé aux sons de plusieurs beatmakers depuis que nous avons commencé à le suivre. Pourtant, la formule Qwel a peu varié d’un disque à l’autre. Il déclame toujours ce rap continu et irrépressible, il le débite encore sur ce ton caractéristique où se mêlent le désespoir et l'urgence. Et les beats, quel qu’en soit le concepteur, se ressemblent toujours. Il n’y a pas d’alternative avec le flow de Qwel, les sons finissent toujours par se noyer dans ce mélange de noirceur, d’insistance et de langueur qui va si bien au phrasé incoercible du rappeur, dans cet espace souvent étroit qui sépare la fascination de la monotonie.
La dernière fois c’est à Meaty Ogre, l’auteur du mitigé Leo vs. Pisces, l’un des producteurs maison de Galapagos4, qu’est revenu ce rôle de faire-valoir. Sans atteindre les fulgurances de The Harvest, ce dernier disque est un bon cru. Les signes distinctifs de ce Freezer Burner, par exemple ses sons rock (sur "Saved", "The Cyclops", "Don Quixote", et d’autres encore), conviennent à notre homme. Parmi les arguments en faveur de ce disque, figure l’assemblage de cordes et de guitare fuzz de l’enlevé "Elijah the Prophet", et plus encore ce "Cabin Fever" à l’orgue torride et implacable, nouveau moment de bravoure à mettre à l’actif de Qwel.
Après, certes, c’est du rap "conscient", sympathique quand Qwel rend hommage aux classiques hip-hop du passé ("Saved"), plus casse-bonbon quand se manifeste cette volonté nigaude de s’élever spirituellement. Surtout qu’ici, ça tourne au rap chrétien douteux ("High Tithe"), voire carrément obscurantiste quand le rappeur s’en prend à la théorie de l’évolution ("MachineGun Monkey")... Mais comme il n’a jamais été interdit de faire abstraction du sens, rendons tout de même justice à ce Freezerburner, reconnaissons qu'il est à ce jour le meilleur album de Meaty Ogre (certes, il n’en a sorti que deux…), et un disque tout à fait acceptable pour le grand Qwel.
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