Elle est jolie, l’histoire de cette alliance entre le vieux groupe culte allemand des années 70 et notre gros rappeur sombre et engagé des années 2000. C’est une sorte de conte de fées rock, ou hip-hop, qu’importe. Elle commence le jour où nos krautrockeurs, avec surprise, découvrent sur l'album From Filthy Tongue of Gods & Griots ce "Classical Homicide" d’anthologie où dälek, soucieux de se dégager des ornières, s’interroge sur le nombre de b-boys qui ont eu la chance d’écouter Faust. Intrigué, Hans Joachim Irmler prend alors contact avec l’entourage du groupe de Newark. L'Allemand rencontre des fans ravis de cette approche, se découvre des affinités avec ces rappeurs très spéciaux et propose de concrétiser cette nouvelle amitié transgenre, transatlantique et intergénérationnelle par un disque commun.
Staubgold :: 2004 :: acheter cet album
Même si trente ans séparent les albums phares des deux groupes, tous partagent cette volonté de ne pas laisser nos oreilles se reposer en paix. Alors, quand on mélange les deux, forcément, ça ne donne pas dans la musique de chambre. Le MC reprend son rap pas facile et ses admonestations, mais au lieu du mur du son assourdissant et infranchissable qui l’accompagne d’habitude, de cette transe industrielle qui finalement porte l’auditeur et le maintient dans un certain confort, ce sont des sons plus variés, plus complexes qui s’imposent, de longues divagations rock, des bouts de guitare ou de basse, des instrumentations plus Faust que Dälek, si l’on excepte les cris qu’Oktopus extirpe de sa machine ("Collected Twilight"), l’instrumental d’ouverture ("Imagine What We Started") et ce remix excellent de "T-Electronique" qui n’aurait pas dépareillé sur Absence.
Ici, plus encore que sur ses propres disques, dälek le rappeur laisse le temps à la musique de respirer. Mais cette musique elle-même se montre plus que jamais irrespirable, elle emporte l’auditeur dans un chaos infernal, elle l’amène au bord de l’asphyxie. Eprouvant, éreintant, exténuant, il n’est pas certain que ce Derbe Respect, Alder soit le meilleur disque des deux groupes. Mais c’est une expérience qui vaut la peine d’être tentée, une décharge sonore à laquelle il faut tenter de s’exposer, une fois au moins. Ne serait-ce que pour se prouver que l’alliance entre rock et hip-hop n’a pas toujours abouti qu’à des groupes metal fusion ridicules.
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