Soul Jazz Records :: 1979-82 / 2006 :: acheter cet album

Premier rappel aux rabat-joies qui considèrent encore que le hip-hop doit revenir à ses fondamentaux en élevant les consciences noires, ceux-là même qui méprisent les party rhymes et les atours clinquants de nombreux rappeurs contemporains : avant "The Message", avant Public Enemy, le rap se fichait comme d'une guigne du contenu politique, social et communautaire de ses paroles. Comme l'indiquent les termes mêmes de DJ et de MC, le hip-hop est au départ une musique de danse, une disco des ghettos vouée à un usage ludique. La quasi-totalité de ces titres issus du New-York rap des débuts sont de longues rengaines groovy faite du même funk discoïde que celui qui enflammait les pistes de danse de l’époque. Quant aux paroles, ce ne sont que des invitations à danser, des relances qui nous exhortent à goûter la musique irrésistible qui les accompagnent (le "Catch the Beat" de T-Ski Valley, le "Funbox Party" du Masterdon Committee), comme le font aussi quelques handclaps et onomatopées (le "Dancing Heart" d’Universal Two).

De fait, dans ce genre balbutiant dont les racines puisent massivement dans le funk, sinon dans le reggae et dans le dub (cf. le "Rapping Dub Style" de General Echo) et où les femmes (Xanadu, The Collective Effort, Universal Two, The Jamaica Girls) prennent autant de part que les hommes, s’entendent autant les longues compositions hypnotiques de la house, de la techno ou de la gogo à venir, que celles du rap contemporain fidèle au format couplet/refrain, prompt à la chronique sociale et adepte du storytelling. Même si le phrasé et plusieurs gimmicks vocaux ("and you don’t stop", "throw your hands in the air") sont restés indissociables du genre, la majeure partie du rap joué de nos jours, et en France plus qu’ailleurs, n’a plus grand-chose à voir avec celui des origines. Cela pourrait même être un autre genre, ne partageant le même nom qu'en mémoire d’une lointaine filiation.