Sans conteste, Awolrus est un acteur clé de l'underground californien. A son échelle, il est une star. Pourtant, il est ardu de lui trouver un chef d'œuvre. Serait-ce Souldoubt, l'album des tubes ? Slanguage, sa virée free jazz avec Daddy Kev ? Number 3 On The Phone, pour le fabuleux "Carnage Asada" ? Difficile à dire, chaque disque mêlant le brillant au frustrant. Alors peut-être faut-il, à tous, préférer ce calme, court et discret Only Death Can Kill You, sorti avec Factor.

AWOL ONE & FACTOR - Only Death Can Kill You

A première vue, ce projet commun d’une demi-légende de l'underground rap et d’un beatmaker aussi prolifique que méconnu pouvait aboutir au passable, voire au pire. Après tout, les collaborations du producteur de Saskatoon avec d’autres rappeurs californiens (Akuma, Existereo, Kirby Dominant) n'ont pas toutes été des plus mémorables. Nous étions en droit de redouter un Awol One geignard s’exprimant en pilotage automatique sur ces samples de guitare pas toujours inspirés dont Factor est tout spécialement friand.

Mais non. In fine, ce disque sans prétention est une réussite. Awol One trouve ici des boucles simples qui conviennent à son éternel numéro de rappeur dépressif, en train de deviser à moitié ivre devant une chope de bière. Quand notre rappeur philosophe sur la fuite du temps ("Old Babies"), Factor sort la guitare mélancolique idoine. Quand il entame avec quelques amis un titre bonhomme ("Digital Angel"), le Canadien lui offre la mélodie bondissante qui va bien, avec une science des variations dont il n'a pas toujours été capable. Et quand le train-train s’installe, quand l’album s’éternise sur un rythme pépère, Factor relance la machine avec un beat plus sec et dérangeant serti de scratches ("Smokin’ Coffee").

Le duo se dépasse même sur l'excellent "Sunday Mourning", où le producteur place en refrain un passage ralenti du "Mourning Sunday Morning" de Free, pendant que le rappeur chantonne et qu'il souligne le propos de "that’s right".

Il y a de fortes chances que ce Only Death Can Kill You trop underground passe inaperçu, qu'il s'égare dans les méandres de la discographie abondante des deux hommes. Pourtant, même s'il n'est pas le plus tonitruant, il est fort possible qu'il soit en fait le meilleur et le plus abouti de ses instigateurs.

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