Dudley Perkins, c’est Declaime, ce proche des Alkaholiks et de Lootpack, auteur il y a quelques années d’un Andsoitisaid sympathique mais sans plus. Depuis deux albums, le bonhomme a raccroché son costume de rappeur pour mener sous son véritable nom une carrière de chanteur soul / funk. Cependant, la différence entre ce registre et l’ancien n’est pas bien grande. Avant, Perkins faisait du rap massivement infusé de funk. Aujourd’hui il chante, parfois, mais le hip-hop n’est jamais bien loin. Quant au producteur de ce nouvel album, c’est encore ce bon vieux Madlib. Aucune surprise, donc, si le résultat est le même qu’avant. Comme ses prédécesseurs, cet Expressions se révèle assez agréable, mais il n’est jamais renversant.
D’abord, il y a toute cette panoplie soul et funk d'époque, ressortie telle quelle du placard : côté paroles, c’est chansons d’amour douces, odes au Tout-Puissant, invitations à taper des mains et autres refrains simplissimes ; côté musique, c’est cuivres à tous les étages, guitare groovy, chœurs chatoyants, instrus évanescentes et synthés, dont un chipé chez Kraftwerk ("The Last Stand"). Il n’y qu’à écouter le titre d’ouverture pour se faire une idée. "Funky Dudley" est censé être le tube de cet album, mais il est plus irritant qu’autre chose, il n’est qu’un immense cliché funk. Et la présence de Madlib n’arrange rien. Comme souvent, ses sons laid-back et ce rythme lent que certains prennent pour du génie, ne sont en fait qu’une formule atrocement creuse.
Ce qui sauve l'album, c’est sa durée, assez courte pour ne pas se lasser. C’est aussi le numéro de Dudley Perkins, ses paroles aux airs d’improvisation, ce ton naïf qui ressemble à une subtile autodérision, plus légère que ne le suggère le visage d’homme noir sévère et concerné que le chanteur affiche sur la pochette. Et puis il y a au moins trois titres qui se distinguent. D’abord, "Me" et ses chœurs langoureux ; juste après l’excellent piano de "Testin' Me" ; et le morceau mélancolique caché en fin d'album, mélange très subtil de piano, de guitare, de synthé et de la voix de Perkins. Trois titres pour montrer que Expressions (2012 A.U.) n’est pas exclusivement fait de cet adult rap rasoir pour des fans de hip-hop vieillissant et avides de respectabilité.
Pour compléter l'aspect discographique, il existe aussi un album sorti en 2004 sous le nom Declaime : "Conversation With Dudley".
Et puis en vrac un album Dudley Perkins & JRawls "It's The Dank & Jammy Show" destiné au marché japonais sorti y a un an ou deux, de tête, un 6 titre (ou 3 je sais plus) avec un groupe obscur nommé Mad Men et quelques autres collaborations sur des maxis que je ne citerai pas en détail vu que c'est pas le sujet ici.
Sinon je rejoins ton avis à savoir "sympathique mais sans plus".
Je voudrais dire aussi un petit mot sur Madlib : c'est un amoureux du diggin qui fait plaisir aux amoureux du diggin. Ses détracteurs sont assez insensibles à cette culture je crois. Sorry pour le pavé.