2Mex ne sortira jamais de grande œuvre. Ce postulat posé une fois pour toute, il y a deux attitudes possibles : laisser tomber, s’en désintéresser définitivement, en espérant qu’un jour ou l’autre quelqu’un prenne l’initiative d’en sortir un best-of ; ou continuer à suivre chacune de ses sorties, malgré tout, même si elles sont de moins en moins intéressantes, histoire de grappiller ici ou là les quelques titres sympas qu’elles proposeront toujours. Cet énième projet du gros Latino sera donc réservé aux assidus, aux nostalgiques qui n’ont pu oublier les petits plaisirs que le bonhomme leur a offerts autour de l’an 2000, à ceux dont l’attachement à 2Mex est plus sentimental que vraiment musical. Car il faut bien l’avouer, avec regret, avec dépit et, pire encore, avec une absence totale de surprise : ce nouveau disque, où il est accompagné du rappeur le moins exaltant des Shapeshifters, est la nouvelle étape d’un interminable déclin.
D’emblée, pourtant, avec les cors de "Haters in the BK Lounge", les deux compères y vont franco. Presque tous les titres sont menés tambour battant, ils comptent beaucoup de cuivres, et puis des chœurs, aussi, et des handclaps. Parfois, ça se présente assez bien, par exemple avec ce "Green Grass" sautillant. Les compères veulent marquer le coup et ils persévèrent avec cette formule tonitruante, jusqu’aux chœurs hallucinés de "International" et jusqu’à un "Full Court Pressure" très rock'n'roll. On trouve même des trompettes sur cette histoire d’amour déçu ("Call You Later") où les deux hommes reçoivent le renfort de l'ami Xololanxinxo. Mais dans tout ça, quand même, il y a du tape-à-l’œil. Le trait est forcé. Préposé à la production, Life Rexall abuse de ces beats qui frappent fort mais dont l’effet ne dure jamais longtemps.
A mi-chemin, l’album devient même proprement irritant. Quand le rythme se ralentit et que le son se dépouille, comme sur "Here to Help", la grossièreté de la musique devient patente. Et tant pis pour les scratches transparents qui tentent d'y mettre un peu de sel. Il n’y a alors plus rien pour masquer l’horrible réalité : ces sons sont dignes du pire album d’Up Above, ce label décevant où 2Mex a sorti quelques disques. Ce n’est pas l’envie qui manque mais, franchement, il serait gonflé de justifier ces beats pour lesquels d’autres seraient brûlés en place publique. Alors après, il y a le rap des deux hommes, le phrasé. Quelles conneries il n’a pas justifié, celui-là ? Mais pour Life Rexall, on sait déjà ce qu’il en est. Quant à 2Mex, ouais, il fait du 2Mex. Mais en pilotage automatique, sans le charisme qui l’a caractérisé autrefois.
L’herbe n’est pas plus grasse ailleurs. C’est un proverbe aussi juste que rabâché, et c’est le thème de "Green Grass", l’un des rares morceaux de ce disque qu’on retrouvera un jour sur le best-of de 2Mex, peut-être, si celui-ci ne se montre pas trop sélectif. Et ce proverbe, le rappeur ne l’a sans doute pas assez médité. Ces beats normaux, ce rap normal, ce n’est pas le sien, ce n’est pas son monde, ce n’est pas le hip-hop éclectique touche-à-tout et l’emo rap à guitare qui lui ont réussi sur B-Boys in Occupied Mexico ou sur cet Exitos y Mas Exitos bientôt réédité. Ce n’est pas celui qu’on a connu, ce n’est pas lui-même. Et vous savez ce qu’il dit le hip-hop, dans un de ses élans de sagesse, quand vous n’êtes pas vous-même ? Il dit que ça ne marche pas.
bon, on ferme boutique...
Ouais je sais, désolé, mais franchement je ne peux pas dire qu'il est bien, ce serait malhonnête.
En plus, j'étais parti pour être plus gentil mais en l'écoutant tout en écrivant la chronique je me suis dit "nan, je peux pas".