Vous ne connaissez sans doute pas EiboL (prononcer "eyeball"), pourtant, le bonhomme est actif sur la scène rap depuis la fin des années 90 et il s’est déjà illustré sur disque, notamment sur le From Point A To H des Hand Held Aspects (H2A), un collectif composé de Losaka, StayInSane et Hippo. Pour aller vers des références légèrement (mais à peine) plus connues, précisons qu’Eibol est aussi le patron de Fingerprint Records, un label indé basé près de New-York, et qu’il a sorti l’an dernier le très bon Workin’ de Nobs, dont il est l’un des producteurs. Et ces deux hommes font partie d’un autre groupe, Neandertal Youth, auteur d’un autre disque très valable, Unearthed : The Early Years.

EIBOL - Karma Kingdom

Si cette ribambelle de noms et de références vous indiffère, retenez simplement l’essentiel : Karma Kingdom est l’album solo sorti par EiboL cette année, et il est diablement bon.

Mené tambour battant sur près d’une heure par un rappeur et producteur particulièrement volubile, il déborde de titres au-dessus du commun, aux premiers rangs desquels l’entraînante intro en chœurs et violons de "All For What", le petit piano insistant et le refrain de "Ask ?’s", l’apaisé "Rhythm" et son saxophone et l’enlevé "No Love Lost". Ces titres figurent sans mal parmi les plus chouettes chansons rap de l’année. Et comble de bonheur, tous figurent sur le même album.

Conçu presque intégralement par une seule et même personne, mis à part les cuts de DJ Gyro et la participation occasionnelle d’un chanteur, d’un guitariste et d’un saxophoniste, Karma Kingdom a cette unicité de ton qui manque à 99% des disques de rap. Pour autant, EiboL n’a pas renoncé à la diversité. La variété des thèmes et des sons est marquée. Et elle est d’autant plus appréciable qu’elle ne jure pas.

Le rap d’EiboL s’essaie à tout sans jamais faire dans le ressassé. Il se colore de mélodie et de guitare, donne dans la nu soul avec J. Fuentes sur "Track 36", tourne jazz rap avec "Place To Be", joue de la petite boucle simplissime qui tue sur "Peel The Nikes", et vire dancefloor sur l’excellent "Dedication" et sur un "Burnin" tout en basse, le seul titre produit par un autre, Losaka. Tout cela avec le même bonheur.

En cherchant bien, on peut reprocher deux ou trois choses à cet album : "Vagabond Song" par exemple, n’est pas la meilleure conclusion qui soit, et il se trouve quelques passages dispensables parmi ces nombreux titres qui dépassent rarement les trois minutes trente. Mais cela n’est que broutille et chipotage eu égard à la richesse de ce Karma Kingdom qu'il est encore temps d'ajouter à votre best-of de 2005.

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