Une alliance entre Circus et Andre Afram Asmar ? Franchement, d'autres s'effraieraient pour moins. Vous tremblez, vous imaginez déjà les raps interminables et même pas virtuoses du premier sur les bidouillages world du second, et vous avez raison. Car c'est exactement le programme proposé par les deux énergumènes sur cet album en commun.
Gawd Bless The Faceless Cowards est la fusion complète des albums les plus récents des deux instigateurs, le tout aussi excellent qu'épuisant Gangstahz Fo Gawd de Circus et le problématique Race To The Bottom d'Andre Afram Asmar.
Sur ce nouveau disque, le rappeur des Shapeshifters s'adonne à son numéro habituel. Il déclame à n'en plus finir ses histoires d'extra-terrestres ras les pâquerettes, il extrapole sur Dieu, les Pyramides et l'origine de l'Homme, il joue son numéro de nigaud obèse américain obnubilé par les thèses conspirationnistes, tandis qu’Asmar ressort sa batterie de cuisine faite de sons bizarres, de percussions exotiques et d'échos dub. Et les deux, bien entendu, se retrouvent quand il est question d’étriper le grand méchant George Bush.
Présenté comme ça, ça fait peur, hein ? Pourtant c'est bien.
Allez savoir pourquoi, les litanies de Circus ont quelque chose de fascinant. Et ça, les fans des Shapeshifters le savent déjà, même s’ils ont renoncé depuis longtemps à l’expliquer. Qui plus est, Asmar ne gâche pas la partie. D’abord, il se fait oublier, puis peu à peu ses sons s’imposent, avec une force qu’on ne lui connaissait pas, jusqu’aux quatre titres finaux.
Sur "Club Lights", Circus n'aime pas le papa de sa copine. Sur "Sir Romancealot", il est un amoureux transi. Sur "Smell Of Ro$e$", il redevient politique. Et "Redeemer" est un freestyle qui condense tout ce dont le Shapeshifter en chef est capable, avec des phases à la "'motherfucker' seems to be the only word that motherfuckers understand these days".
Et chaque fois, sans se départir de ses recettes habituelles, flûtes folles, synthés, ouds, gamelans ou instruments approchants, Asmar livre la composition de circonstance. Avant l’écoute, pendant l’écoute, ce disque fait peur. Mais il sait préserver le meilleur pour la fin. Il sourira aux persévérants.
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