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"Halifax, the Incestuous Village. This shit hole, this sludge box".
Ces paroles pour le moins acerbes déclamées avec insistance sur une instru de circonstance sont le début d'un titre dédié à dénoncer la mécanique du wannabisme qui s'est emparée de la fameuse scène hip hop de la ville canadienne, ou tout du moins de ses graffeurs. Disproportionnée, la déclaration a de quoi surprendre, mais Recyclone sait en toute logique de quoi il parle, étant lui-même un pur produit d'Halifax. Apparu en 1998 à l'occasion de Dead World, un premier album sur cassette avec Sixtoo à la production, le rappeur a participé ensuite à deux des albums du Sebutone (The Psyche Intangible et Songs I Hate), et côtoyé d'autres compères canadiens, Pip Skid, DJ Moves et quelques autres.
Numbers est le troisième album du rappeur, épaulé à la production par J. LaPointe, au emceeing par un Knowself à la voix particulièrement basse, aux scratches par Skratch Bastard des 1200 Hobos et aux instruments par quelques autres. Quels que soient les griefs de Recyclone envers Halifax, sa musique se distingue peu de celle en vigueur dans la cité de Nouvelle-Ecosse : tout du long de l'album prévaut un rap sombre capable d'interpeller autant les fans de rock, d'indus (écoutez "Land of the Half Dead") ou d'indie que ceux de hip hop.
Le résultat n'est malheureusement pas toujours à la hauteur des classiques du genre. Malgré quelques réussites ici ou là, malgré le tube "Business Man", son orgue antédiluvien façon vieux disque des Stranglers et sa thématique "nous sommes perdus, nous sommes tous des numéros", l'ensemble de l'album est assez poussif. Systématiquement, le rappeur en fait trop dans l'alarmisme et avec ses incessantes réflexions imagées sur ses rapports à la ville, à la vie, au monde. Quels que soient les efforts déployés, difficile de croire l'homme au profil d'étudiant sage qui apparaît sur la pochette quand il déclare, plein de hargne envers les puissants de ce monde "be prepared to get a machete in the neck". La gravité est un piège et une grande partie de Numbers y succombe. Dommage, car l'homme a un passif conséquent et ne doit surtout pas être confondu avec les suiveurs hip hop d'Halifax qu'il condamne lui-même.
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