BABYCHIEFDOIT – Animals Only
Un petit prodige appelé « chief » quelque-chose et qui, dès seize ans, marque les esprits en se présentant comme un pur produit de la jungle urbaine de Chicago, appuyé par une musique brutale et bordélique qu’on jurerait sortie tout droit des enfers. Cela vous rappelle quelqu’un, hein ? Et pourtant, on ne parle plus des années 2010, et il ne s’agit pas de Chief Keef. Il est question cette fois de BabyChiefDoit, un type né en 2008, et qui était un bambin aux débuts de la drill music.
Animals Only est sa première « mixtape », et elle est déjà extraordinaire. Son titre dit tout. Le ghetto est un zoo, il est une jungle, on nous le dit depuis fort longtemps. Et BabyChiefDoit s’emploie à rappeler sa nature sauvage avec ses propos anarchiques empreints d’agressivité, parsemés de libido sans sentiment et arrosés généreusement d’onomatopées agressives.
Pour amplifier cette vigueur juvénile, tout cela est délivré tambour battant avec des sons bancals et branlants, dominés par des synthés prenants et des basses assourdissantes. C’est proche de la cacophonie, comme sur le terriblement chaotique « Doit The Best ». Mais parfois, c’est plutôt mélodique, comme sur « Hummingbird ». Et c’est suffisamment varié pour qu’on ne s’ennuie pas.
Sur Animals Only, on voit passer un duo avec Star Bandz, une femme qui rappe sur le même ton que BabyChiefDoit (« Too Slow »). On l’entend présenter son parcours d’animal amoral sur les sons évaporés de « Zoo Life Blessing ». Et « 6ix Times 2Day » est un modèle de minimalisme.
Cet adolescent au visage poupin a digéré plus d’une décennie de drill music. On entend chez lui plusieurs de ses prédécesseurs. Le sample de voix grand écran de « Laugh At Em » évoque ceux qui ont révélé G Herbo. La mélodie sur nappes de « Drowned », quand le rappeur évoque son idéal féminin, rappelle les chantonnements de Lil Durk. Dix ans après, Chicago n’a rien perdu de son danger et de son nihilisme, comme le bien nommé « King Of The Jungle » le confirme, quand BabyChiefDoit exalte de manière folle la violence, la drogue et le sexe non protégé.
Ce bébé s’inscrit fièrement dans cette tradition. Il a vraiment mérité d’être un chef.
BabyChief le fait, en effet.
