2 CHAINZ – T.R.U. REALigion
![2 CHAINZ – T.R.U. REALigion](https://www.fakeforreal.net/wp-content/uploads/2025/02/2-chainz-t-r-u-realigion.jpg)
A y regarder de près, on remarque que certains rappeurs importants des années 2010 ne sont pas de première jeunesse. Le cas d’école, c’est 2 Chainz. C’est la trentaine bien sonnée, en effet, que Tauheed Epps devient une figure de premier plan. Avant cela, il a été membre de Playaz Circle , un duo signé sur le label de Ludacris, Disturbing Tha Peace, et connu pour le single « Duffle Bag Boy », sorti en 2007 avec un Lil Wayne au sommet de sa carrière. Mais après deux albums, l’aventure prend fin, et le rappeur doit se réinventer en solo.
Il le fait alors en mettant toutes les chances de son côté : il adopte un pseudo moins embarrassant que le précédent, Tity Boi (en gros, « Garçon Nichon »). Il déploie son carnet d’adresse bien rempli pour empiler une jolie collection de featurings. Il investit une trap music générique, mais cocasse, loufoque, presque bon enfant. Et quelques mois après une première mixtape de référence, Codeine Cowboy, celui qui s’appelle désormais 2 Chainz délivre T.R.U. REALigion, une sortie très réussie, davantage même que l’album qui suivra un an après chez Def Jam, Based On A T.R.U. Story.
Cett mixtape appartient à la prestigieuse série des Gangsta Grillz de DJ Drama, ses titres sont produits par tous les beatmakers du moment (Mike WiLL Made-It, Lex Luger, Southside, Drumma Boy, Fatboi, etc.) et y participent des grands noms du rap aussi variés que Birdman, T.I., Young Jeezy, Yo Gotti, Big Sean, Jadakiss, quelques valeurs alors émergentes comme Meek Mill et Kreayshawn, et même le vétéran new-yorkais Raekwon.
2 Chainz accorde son succès tardif à un concept qui lui est propre, et qu’il présente en introduction : le griming, mélange de travail de longue haleine (« grinding ») et d’accord avec le temps présent (« timing »). Le premier terme est illustré par la persévérance qu’il a fallu à 2 Chainz pour se faire une place. Le second, quant à lui, est confirmé par la nature presque standard, en 2011, qui caractérise cette mixtape.
Le premier vrai titre est un excellent « Got One », en quelque sorte un hommage à la bonne ville d’Atlanta. Et celui-ci, comme tous les autres, ne fait que décliner le son local, rythmes trépidants et synthés claironnants, et à traiter des incontournables thèmes du sexe, de la drogue et de l’argent.
Tout est conventionnel, mais tout ou presque réussit à 2 Chainz. Sur « Undastatement », Lex Luger décline avec bonheur l’un de ces sons bastons qui en ont fait le beatmaker du moment. Sur « Stunt », 2 Chainz et Meek Mill rivalisent de vantardises sur des synthétiseurs tourbillonnants. « Murder » est à la fois violent et burlesque à souhait, contribution de Kreayshawn incluse. « Kesha » est une jolie romance pour mauvais garçon. « Riot » remplit son rôle de single qui tabasse, de même qu’une version remixée de « Spend It » avec le renfort de T.I., le titre qui a été pour 2 Chainz le passeport vers le succès.
Plus ça tape, plus ça lui va, comme le prouve en creux le sirupeux et ennuyeux « K.O. », avec Big Sean, dans une seconde moitié de mixtape moins jubilatoire que la première. Il faut à ce rappeur les sons qui vont avec sa vigueur juvénile et sa posture de grande gueule exaltée. Dans de telles conditions, 2 Chainz est 2011, et 2011 est 2 Chainz, la personne à faire écouter, plus tard, à ceux qui voudront comprendre à quoi pouvait bien ressembler le rap, dans ces années-là.