FUTURE & METRO BOOMIN – We Don’t Trust You

FUTURE & METRO BOOMIN – We Don’t Trust You

Future et Metro Boomin en têtes d’affiche, avec pour les seconder Travis Scott, Playboi Carti, The Weekend, Kendrick Lamar et Rick Ross. Voilà ce qui ressemble fort à un blockbuster. Ou plus précisément : voilà qui ressemble fort à un blockbuster de la décennie précédente.

Ses deux principaux instigateurs, néanmoins, même s’ils ont souvent œuvré ensemble, même s’ils sont étroitement associés l’un à l’autre, n’avaient encore jamais délivré d’album sous leurs deux noms. Et ils semblent si satisfaits de le faire que, quelques semaines plus tard à peine, ils rempilent avec une suite à ce We Don’t Trust You intitulée, logiquement, We Still Don’t Trust You.

Sur ce premier album signé en commun (et qui, bien sûr, a très vite grimpé au sommet du Billboard), ces deux artistes établis jouent de leur légende. Ils extrapolent dès les premières plages (« We Don’t Trust You », « Young Metro ») les célèbres tags sonores du producteur, et ils samplent plusieurs fois Prodigy de Mobb Deep (RIP) quand ce dernier prétendait être au sommet. Ce sont deux hommes sûrs de leur fait et aguerris qui déroulent, pour l’un, ce sujet ordinaire qu’est l’excès de drogue, de sexe et de luxe, et pour l’autre une trap music qui n’a plus aucun secret.

S’il faut trouver un élément distinctif à cet album, en dehors de ses thèmes habituels, si quelque chose de neuf rassemble aujourd’hui ces deux stars du rap, c’est l’hostilité sous-jacente envers une autre star du rap. We Don’t Trust You vient du fameux tag « if Young Metro don’t trust you », mais le « you » en question, dans le contexte actuel, pourrait tout aussi bien être Drake. Ce dernier, en tout cas, est la cible d’un Kendrick Lamar en feu sur « Like That », le single à l’origine du beef qui a dominé l’actualité du landerneau rap tout au long du premier semestre 2024.

Cette attaque, c’est l’événement de cet album. C’est pour elle, souvent, que We Don’t Trust You est mentionné, plutôt que pour les rengaines trap routinières de deux hommes. Car tout ce foin mis de côté, Future et Metro Boomin n’offrent rien de plus que ce qu’ils ont toujours su faire.

Et ils ont bien raison. Certaines fois, Future et Metro Boomin sont en pilotage automatique, mais d’autres, ils sont au sommet de leur maîtrise, l’un avec sa voix chaude et mélancolique, l’autre avec ses mélodies parcourues de surprises, comme ces « Ice Attack », « Magic Don Juan (Princess Diana) » et « Everyday Hustle », découpés en mouvements distincts, de manière impromptue.

Les passages les plus marquants, ce sont ceux où transparait la vérité derrière la débauche et la défonce. Ceux où se fissure la façade de succès. Ceux où se dévoile le Future paranoïaque et défiant (« We Don’t Trust You », « Ain’t No Love »), le Future qui redoute de finir seul au monde (un « Runnin Outta Time » bellement mélancolique). Ces élans de vulnérabilité ont toujours été l’atout de ce géant d’Atlanta. Renforcés par les sons à la fois accrocheurs et sombres de son complice, ils réussissent une fois encore à cet album tardif, son meilleur depuis longtemps.

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The Notorious S.Y.L.V.

The Notorious S.Y.L.V., a.k.a. Codotusylv, écrit sur le rap et tout un tas d'autres choses depuis la fin des années 90. Il fut le fondateur des sites culte Nu Skool et Hip-Hop Section, et un membre historique du webzine POPnews. Il a écrit quatre livres sur le rap (dont deux réédités en version enrichie), chez Le Mot et le Reste.

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