L'importance excessive accordée en mai à la sortie de prison de Gucci Mane, bien que le temps fort de sa carrière date de dix ans déjà, nous en donnait une illustration : en 2016, nous faisions peut-être la même erreur que 20 ans plus tôt. Quand nous parlions de rap, nous braquions l'essentiel de nos regards sur Atlanta, comme nous l'avions fait autrefois sur New York. Nous considérions que tout était là, que cette ville générait les grands classiques du genre. Nous peuplions nos classements de projets venant de cet endroit. Le temps viendrait sans doute où il faudrait refaire l'histoire, et redécouvrir des dizaines de grands albums et mixtapes nés en d'autres endroits, et moins sujets à l'attention des médias. Mais dans l'instant, c'était toujours cette grande cité du Sud qui nous satisfaisait le plus, quand on constatait que Future, Young Thug, PeeWee Longway, 2 Chainz, Skooly, 21 Savage, Ralo, Hoodrich Pablo Juan, Johnny Cinco, et bien d'autres encore, étaient toujours ceux qui contentaient nos oreilles.
# 16. JOE BLOW - You Should Be Payin' Me Too!!
Joe Blow, l'ancien protégé de The Jacka, a survécu à la mort de son mentor. Cette suite à son album référence de 2011, You Should Be Payin' Me, a été l'une des sorties 2016 les plus marquantes du côté de la Baie de San Francisco. Le rappeur y adopte avec réussite le rôle du chroniqueur de rue, il y souligne adroitement son fond de mélancolie avec des nappes, des samples pitchés ou des voix évaporées.
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# 15. JOHNNY CINCO - Cinco 2
Evolution du rap d'Atlanta, suite. Avec Johnny Cinco, le phrasé tourne de plus en plus au chant, un chant marmonné peu intelligible. Avec lui, aussi, le rythme est secondaire, des ritournelles prenant pour de bon le dessus. Cela n'a plus grand chose à voir avec le rap tel qu'on l'entendait avant, mais c'est rempli de mélodies irrésistibles ou mélancoliques. Bref, c'est souvent bien, et rien d'autre ne compte.
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# 14. HOODRICH PABLO JUAN - Designer Drugz 2
Face à la profusion de mixtapes produites à flux tendus par les héritiers de Gucci Mane, à Atlanta, et par les multiples cousins de Future, Young Thug ou Migos, il faut parfois lutter pour identifier celle qui s'élève au-dessus des autres. En 2016, la Designer Drugz 2 de Hoodrich Pablo Juan pourrait être celle-là, et pas seulement pour la contribution remarquée mais parcellaire du Français Brodinski.
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# 13. SKOOLY - Trench Gotti
C'est sur un format court, que Skooly, des Rich Kidz, a livré ce qui pourrait bien être sa meilleure sortie. Trench Gotti est en effet une mixtape limitée à 6 titres, mais très bien produite par le duo Nard & B, ces collaborateurs de Future qui n'ont décidément pas leur pareil pour sublimer cet après-trap mélancolique et bizarre, ce Marvin Gaye de l'ère gangsta, qui caractérise l'Atlanta des années 2010.
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# 12. KAMAIYAH - A Good Night in the Ghetto
Kamaiyah, c'est la bouffée d'air frais qu'il fallait au rap, dans des années 2010 où il navigue entre débauche et envies de discours adulte. Comme le titre l'indique, la rappeuse d'Oakland s'emploie à y célébrer les petits bonheurs du ghetto, sur un ton sautillant et primesautier, renouant avec le rap et le R&B les plus légers des années 90, tout en s'inscrivant dans une longue tradition musicale californienne.
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# 11. JIMMY WOPO - Woponese
D'abord parrainé par les rappeurs stars de sa ville de Pittsburgh, Wiz Khalifa et Mac Miller, puis par d'autres, Jimmy Wopo s'est fermement installé sur les écrans radar avec le grand single "Elm Street". Il a gagné ainsi sa place parmi les valeurs montantes du rap, dans la catégorie la plus dangereuse : celle du délinquant impénitent, porté par la fougue de la jeunesse et par une musique nerveuse.
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# 10. SHY GLIZZY - Young Jefe 2
Young Jefe est souvent considérée comme la mixtape de référence, pour Shy Glizzy. Mais cette seconde édition lui est en fait bien supérieure. Pas d'invités ici, si ce n'est un appel de prison de C-Murder. Pas de vrais tubes, mais une musique triste, qui contraste avec l'ordinaire vantard et matérialiste que déclame le rappeur. Et pourtant, Young Jefe 2 nous dévoile un Shy Glizzy à son plus intense.
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# 09. Z-RO - Drankin' & Drivin'
Drankin' & Drinkin' a été la deuxième sortie de Z-Ro en 2016. Après de 20 ans de carrière, le vétéran de la Screwed Up Click ne faiblit pas. Nourri par son fiel et par son dédain pour les haters, il excelle comme toujours dans un rap dur et agressif, et pourtant mélodique et mélancolique. Seule la durée, plus longue, qui délaye un peu son intensité, éloigne cet album de l'excellence du EP avant-coureur Solid.
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# 08. DENZEL CURRY - Imperial
Ancien membre affranchi du Raider Klan, Denzel Curry n'en finit pas de progresser. Avec Imperial, le rappeur de Carol City livre son meilleur projet à ce jour. Cet album gratuit entre colère et introspection, entre musique post-trap contemporaine et hip-hop conscient à l'ancienne, entre Rick Ross et Joey BadA$$, devrait être en mesure de contenter tous les publics et les frères ennemis du rap.
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# 07. ARM & TEPR - Psaumes
Le rap à textes, celui qui signifie, celui qui veut dire quelque chose. Le rap ouvert sur les musiques électroniques de type house, celui qui se métisse avec elles. Voilà deux fantasmes bien français, souvent partagés par une critique qui ne le comprend pas. Ces fantasmes, cependant, Arm les réalise pour de bon. Il les incarne sur l'album Psaumes, grâce à sa vieille complicité avec le producteur Tepr.
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# 06. RALO - Diary of the Streets 2
Coopté par Future, Birdman, et plus tard Gucci Mane, Ralo est l'une des figures nouvelles à avoir émergé d'Atlanta en 2016. Ancien dealer, il proclame avec exaltation ses envies de survie et de réussite, avec un rap haut-perché qui rappelle le Thugga d'il y a quelques années. Pour le meilleur, souvent, plusieurs de ses morceaux se montrant tout aussi possédés qu'un Young Thug à son sommet.
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# 05. PNL - Dans La Légende
Dans La Légende, en effet. Ceux qui avaient été impressionnés par le buzz autour de PNL n'avaient rien vu. En 2016, le duo des Tarterêts est entré pour de bon dans la vie de monsieur tout le monde, et dans tout ce que la France compte de médias. A raison, ce troisième album étant une nouvelle réussite, même si, à force de se concentrer de manière trop exclusive sur sa formule, le duo peut lasser parfois.
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# 04. SKEPTA - Konnichiwa
Depuis l'intérêt manifesté à son égard par des figures du rap américain, on observe en 2016 une résurgence du grime comme sujet d'attention médiatique international. Adoubé par Diddy, Kanye et Drake, Skepta incarne ce renouveau. L'accueil critique réservé à son dernier album, Konninchiwa, le prouve. Un accueil mérité, tant il concilie authenticité grime et classe internationale.
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# 03. Z-RO - Solid
Ce dernier EP n'offre rien de neuf aux adeptes de Joseph McVey, l'un des précurseurs de cette vague de gangsters qui souffrent et qui chantonnent, l'un des meilleurs représentants de cette tendance, tout autant que du rap de Houston. Ce court projet n'en apporte pas moins une nouvelle pièce à une discographie exemplaire. Solide, Z-Ro ? Non, bien plus que ça : légendaire.
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# 02. KANYE WEST - The Life of Pablo
L'année 2016 aura vu Kanye West débloquer pour de bon, et finir, épuisé, à l'hôpital. Elle aura aussi commencé fort, avec cette œuvre en évolution perpétuelle qu'est son septième album. Franchissant encore un palier dans sa mégalomanie, Kanye s'y célèbre, lui. Et il déploie son talent avec une pop philarmonique chargée, à la limite de l'indigeste, et néanmoins géniale.
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# 01. PEEWEE LONGWAY - Mr. Blue Benjamin
Sur ce premier album trop long, on préfère PeeWee Longway dans son registre le plus trap, offensif et loufoque, plutôt que dans ses essais mélodieux à l'Auto-Tune. Mais dans l'ensemble, il confirme le statut acquis ces dernières années : en l'absence de son parrain Gucci Mane, celui du maître et du porte-drapeau de la scène rap majeure, de la plus riche et de la plus prolifique, celle d'Atlanta.
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LE CLASSEMENT DES LECTEURS
2016 a été une année riche, à en juger par le nombre et par la diversité des albums désignés par les lecteurs de Fake For Real. Mais elle a été aussi très indécise. Contrairement aux précédentes, aucun projet ne s'est clairement distingué des autres à l'issue de ce référendum. Et le vainqueur aurait pu aisément en être un autre, les cinq œuvres de tête se tenant dans un mouchoir de poche. Comme d'habitude, la postérité arbitrera, elle nous dira qui avait raison.
- KODAK BLACK - Lil B.I.G. Pac
- YG - Still Brazy
- PNL - Dans la Légende
- KANYE WEST - The Life of Pablo
- WESTSIDE GUNN - Flygod
- DENZEL CURRY - Imperial
- A TRIBE CALLED QUEST - We Got It From Here... Thank You 4 Your Service
- 21 SAVAGE & METRO BOOMIN - Savage Mode
- DANNY BROWN - Atrocity Exhibition
- PEEWEE LONGWAY - Mr. Blue Benjamin
- CHANCE THE RAPPER - Coloring Book
- KEVIN GATES - Islah
- SCHOOLBOY Q - Blank Face
- SHY GLIZZY - Young Jefe 2
- A-WAX - Pushin Keyz
- FUTURE - Purple Reign
- KEKRA - Vréel
- YOUNG THUG - Jeffery
- EZALE & DJ FRESH - The Tonite Show
- KA - Honor Killed the Samurai
- RAE SREMMURD - SremmLife 2
- SKEPTA - Konnichiwa
- APOLLO BROWN & SKYZOO - The Easy Truth
- GUCCI MANE - Woptober
- HOODRICH PABLO JUAN & SPIFFY GLOBAL - Master Sensei
- VINCE STAPLES - Prima Donna
- GUCCI MANE - Everybody Looking
- TRAVIS SCOTT - Birds in the Trap Sing Mcknight
AUTRES SORTIES NOTABLES
Ci-après, une poignée d'autres projets rap remarquables sortis en 2016. Pas tous ceux à retenir de cette année, naturellement. Ils seraient trop nombreux. Mais ceux que Fake For Real a pris le temps de chroniquer et qui méritent d'être cités, soit parce qu'ils auraient pu figurer parmi les meilleurs, soit parce que, bien qu'imparfaits, ils méritent que l'on s'en souvienne.
2 Chainz a voulu sortir un album avec celui qui lui a mis le pied à l'étrier. Mais pour des questions de label, et même s'il participe à la plupart des morceaux, Lil Wayne n'a pas pu poser son nom sur 'ColleGrove''. Il faut dire, cependant, que celui qui imprime sa marque ici, celui qui, comme à son habitude, colle le mieux à l'esprit du temps avec son rap loufoque et irrésistible, c'est bel et bien 2 Chainz.
21 SAVAGE & METRO BOOMIN - Savage Mode
A l'heure des cinglés de l'après trap music, et de ses excentriques aux cheveux verts, 21 Savage en ramène les thèmes du côté obscur de la rue, avec une voix sourde et lourde de menace, avec des paroles dures. Sa formule pourrait en être trop mortifère, comme sur ses mixtapes passées, s'il ne bénéficiait pas sur celle-ci de l'aide du producteur le plus inspiré de ces dernières années, Metro Boomin.
A-Wax livre un successeur à son grand Pullin' Strings. Et cette fois, au lieu de choisir la guitare comme ingrédient de base pour sa musique, il opte pour le piano. Parfois, ce dernier se révèle idéal pour souligner le spleen du rappeur. Mais il le maintient aussi trop longtemps dans la morne plaine. Et A-Wax, avec ce qui est pourtant un nouveau grand disque, est loin de renouveler son exploit de 2014.
Deux rappeurs de premier plan ont dit du bien d'Asian Doll : Nicki Minaj et Gucci Mane. Et ce en toute logique, la Texane étant l'héritière des deux. De la première, elle a retenu les looks flashy et l'allure malcommode. Avec l'autre, dont elle a rejoint le 1017 Records, elle partage un gangsta rap absurde et exacerbé. Et tout cela était déjà en place sur Drippin' in Glo, le projet qui l'a sortie de l'anonymat.
Cam & China, ce sont les anciennes Cammy et Cee Cee, de Pink Dollaz, un quintet féminin aux paroles très explicites, qui avait participé à l'éphémère vogue jerkin'. Plusieurs années après, les deux jumelles ont quitté l'adolescence et, affranchies de leur musique de départ, elles se montrent assoiffées de succès, soucieuses de vivre à leur guise leur vie sentimentale, et adroites comme jamais au micro.
Un an après le remarquable Marauding in Paradise, Jazz Cartier confirme qu'il y a d'autres rappeurs à suivre que Drake, à Toronto. Tirant profit de la notoriété nouvelle de la scène rap locale, il joue un peu plus de la mélodie et des titres langoureux sur Hotel Paranoia. Mais à part ça, c'est toujours le même rappeur, servi comme jamais par le cinematic trap de son producteur attitré Michael Lantz.
CELLY RU - Still da Same Nigga 2
Dans la foulée de Mozzy, l'une des révélations rap de l'année 2015, il est temps de découvrir ses compères de la scène d'Oak Park à Sacramento, et de goûter à leur propre déclinaison du gangsta froid, neutre, distant, descriptif et clinique par lequel il s'est fait connaître. A commencer, pourquoi pas, par son proche collaborateur Celly Ru, et par le second volet réussi de son Still da Same Nigga.
A 19 ans seulement, CupcakKe repousse les limites du rap pornographique, en nous parlant avec force (et avec humour) de son appétit pour les verges et de la voracité de son vagin. Rappant avec fureur et intensité, elle ne vaut pourtant pas que pour son image de folle de sexe, comme l'a montré sa première mixtape, dont les thèmes sont plus diversifiés et nuancés que ne le présageaient les singles.
Parce qu'il s'est davantage plu dans l'ombre que dans la lumière, on ne mesure pas toujours la richesse de l'héritage du turntablist D-Styles. Celui-ci s'étend au-delà de son unique album, le grand Phantazmagorea, comme nous le rappelle la compilation mixée riche, équilibrée et représentative des talents de l'Américano-philippin, offerte par le Français Bachir dans le cadre de la série The Only Mixtape.
DENIRO FARRAR - Mind of a Gemini
Deniro Farrar, le rappeur de Charlotte, continue à creuser son sillon à lui. Avec ce court album, l'un de ses deux projets de 2016, il se penche sur son existence, tout comme sur la nature duale de sa personne, entre gangster et rappeur réfléchi. Il réinvestit aussi le rap "conscient", avec ses sons d'inspiration Great Black Music et ses extraits de Malcolm X, mais de manière actuelle, pertinente et personnelle.
En 2016, Future a maintenu la dynamique, marquant sa présence par de nouvelles mixtapes, dont une dès janvier, Purple Reign. En retrait, marquée par une forme de lassitude et d'abandon, signifiant en quelque sorte la reddition finale de Future à toutes formes de drogue, celle-ci était plus ordinaire que les Beast Mode et 56 Nights de 2015. Mais chez Future, l'ordinaire peut parfois être extraordinaire.
Ce rappeur d'Atlanta a été au sommet tout au long de 2015, et il continue sur sa lancée en 2016 en sortant deux projets coup sur coup, en janvier et février. Le second est le plus célébré, mais il est en fait comme l'autre : inégal, routinier, quoique pourvu de grands titres, à même de préserver son statut de rappeur capital de la décennie. Non, on ne parle pas de Young Thug, mais de Future.
Après dix ans de carrière, Kevin Gates a fini par le sortir, son premier album. Et malgré une tournure parfois fade et mielleuse, attendue quand un artiste vise le succès commercial, le rappeur de Baton Rouge a eu le mérite de rester concentré sur sa posture de bad boy en proie à une grande insécurité sentimentale, celle-là même qui lui a permis de sortir des mixtapes d'anthologie en 2013 et en 2014.
GUCCI MANE - Everybody Looking
Everybody Looking. Tout le monde regarde. En 2016, en effet, nous avons tous eu les yeux rivés vers le maître. Deux mois après la prison, il a offert un album à un public fin prêt. Sans l'opposition des sceptiques, ou de détracteurs qui ne peuvent plus rien ignorer de son influence, celui-ci a été son premier numéro 1. Il n'est pourtant qu'un Gucci Mane moyen - ce qui, à l'échelle du rap, signifie qu'il est bon.
Après un Everybody Looking réussi, Gucci Mane a continué à mettre à profit sa liberté retrouvée en sortant Woptober. Plus fidèle au vieux Guwop, plus homogène, mieux fourni en ces vieilles rengaines trap absurdes dont il est l'expert, plus mixtape en somme, ce projet n'en est que meilleur. Décidément, on n'aura rarement vu un vétéran du rap aussi durable et addictif que cet homme.
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HOODRICH PABLO JUAN - Master Sensei
2016, c'est aussi l'année de Hoodrich Pablo Juan. Le rappeur d'Atlanta sort alors ses meilleures mixtapes, notamment celle-ci, Master Sensei, produite par Spiffy Global et Nard & B. Avec ses morceaux gaillards, hédonistes et déglingués, avec sa musique remplie de délicieuses mélodies tournoyantes et enfantines, cette sortie est une immersion profonde dans la trap music de l'époque.
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A toujours pas 20 ans, Kodak Black, l'un des Freshmen 2016, a concrétisé en sortant une nouvelle mixtape de qualité. Sur celle-ci, le Floridien ne fait pas son âge, nous parlant sur un ton déprimé des embûches que la vie lui a déjà réservées ; à commencer par la prison, son sujet central, et l'endroit où il dut retourner quelques semaines après cette sortie qui aurait dû propulser sa carrière.
Des trois filles du White Girl Mob, seule Lil Debbie aura su poursuivre sa carrière, avec quelques singles remarquables et les louanges de grands comme Snoop Dogg. Ses sorties longues, toutefois, ont souvent été décevantes, même s'il faut distinguer Debbie, dont l'ego-trip effronté et unilatéral révélait cette poignée de titres supérieurement bons qu'étaient "Damn", "F That" et le conclusif "I'm On".
On aime Awful Records pour ses filles. Après Tommy Genesis et Abra, ça a été au tour de Lord Narf de briller, avec son rap adroit prononcé d'une voix basse et inquiétante, avec sa façon de s'approprier tous les ingrédients de la trap music d'Atlanta (le sexe, l'argent, la violence), mais de les cuisiner selon une recette unique, de suivre une formule qui ne ressemble à aucune autre qu'à elle-même.
Même si c'est par lui qu'elle s'est fait connaître, Noname mérite mieux qu'une étiquette réductrice de "Chance the Rapper au féminin". Cette rappeuse formée à la poésie et adepte d'une musique délicate, appartient certes à la même face du rap de Chicago, la plus intello et la plus arty. Mais elle en a livré l'un des projets les plus convaincants, avec ce roman d'apprentissage qu'est presque Telefone.
Modèle pour Calvin Klein, et militante féministe conviée à l'occasion à Harvard, Princess Nokia est le reflet parfait de cette grande métropole intellectuelle, branchée, métissée et progressiste qu'est New York. Il en est de même de son meilleur projet, 1992, où s'affichent sonorités IDM et afro-futurisme, ainsi que cet éclectisme musical et ces engagements qui vont si bien à la Grosse Pomme.
La mixtape qui a révélé Queen Key, Your Highness n'est pas spécialement originale. Tout comme pour la drill locale, ses influences viennent de la trap music. La rappeuse de Chicago s'y lance dans des ego-trips démesurés, elle proclame sa supériorité de manière impudente. Mais la perspective féminine, celle de ce petit bout de femme pleine d'humour et qui n'a pas froid aux yeux, fait la différence.
Cette fois, il n'est plus possible d'ignorer Rae Sremmurd. Il n'est plus raisonnable, après le carton du single "Black Beatles", d'écouter ces grincheux qui, l'an passé, ont dénigré la futilité des deux frères. Plus varié, plus posé, parfois même plus introspectif, leur second album a en partie démenti ces critiques. Même si ce que l'on continue de préférer chez eux, c'est leur capacité à provoquer la jubilation.
STEFFLON DON - Real Ting Mixtape
Stefflon Don est la rappeuse de la synthèse transatlantique. Elle est capable de faire le grand écart entre le hip-hop américain et le grime britannique. Sur cette première mixtape, elle passe continûment d'un registre à l'autre. Mais la musique qui lui réussit le plus, celle où cette Anglaise d'ascendance jamaïcaine incarne le mieux son personnage de maîtresse femme intimidante, c'est encore le dancehall.
KATE TEMPEST - Let Them Eat Chaos
Kate Tempest se réclame du rap, mais elle appartient à une autre tradition, celle d'un spoken word anglais représenté tout autant par le poète punk John Cooper Clarke que par l'ironie de The Streets. Et comme avec ces derniers, la qualité littéraire de son art n'est pas son seul argument. Sa musique, celle des paroles, celle de sons souvent très synthétiques, est également au rendez-vous.
A TRIBE CALLED QUEST - We Got It from Here... Thank You 4 Your Service
Voici donc, près de vingt ans après leur dernier, l'ultime album d'A Tribe Called Quest dans sa configuration historique. Et contre toute attente, Q-Tip, feu Phife Dawg et tous les autres ont réussi leur sortie, en se montrant, sur une grosse partie du disque en tout cas, truculents, drôles, malins, inventifs, pertinents, engagés et enjoués. Exactement comme autrefois, donc, mais maintenant.
YOUNGBOY NEVER BROKE AGAIN - 38 Baby
Boosie et Kevin Gates participent tous les deux à cette mixtape, intrônisant ainsi leur successeur. YoungBoy NBA, en effet, deviendra à son tour le rappeur le plus populaire de Baton Rouge. Ici déjà, il excelle à sublimer son passé difficile dans les bas-fonds de la ville en un blues du délinquant intense, en une musique mélancolique où s'entendent à parts égales la fierté et la détresse.
Plus policé que 1017 Thug, plus relevé que Barter 6, moins bon que ces deux-là et néanmoins une pièce essentielle de sa discographie, Jeffery coïncide avec la consécration de Young Thug. Arborant une robe sur l'une des pochettes les plus commentées de l'histoire du rap, tout comme André 3000 l'avait fait seize ans avant, il s'impose alors comme l'autre grand ATLien de l'histoire du rap.
Ce rappeur d'Atlanta a été au sommet tout au long de 2015, et il continue sur sa lancée en 2016 en sortant deux projets coup sur coup, en février et mars. Le second est le plus célébré, mais il est en fait comme l'autre : inégal, routinier, quoique pourvu de grands titres, à même de préserver son statut de rappeur capital de la décennie. Non, on ne parle pas de Future, mais de Young Thug.
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