En 1997, alors âgé de 19 ans, Charly Wingate est envoyé en prison pour des histoires de vols. Il n'en sort qu'en 2005, et il y retourne dès 2009, accusé cette fois, dans des circonstances douteuses, d'avoir commandité un meurtre. Il est alors condamné à une peine longue de 75 ans. Autant dire que le rappeur de Harlem, plus connu sous le nom de Max B, a peu de temps pour construire sa légende. D'autant plus que cette période courte est troublée par ses relations houleuses avec Jim Jones. D'abord parrainé par le membre des Diplomats, rencontré via son ami d'enfance Cam'Ron, et après avoir été le moteur créatif de son collectif, ByrdGang, il s'embrouille avec lui, et s'embarque dans l'un de ces beefs durables et mémorables dont est remplie l'histoire du rap.

MAX B - Public Domain 6: Walking The Plank

Vu les circonstances, Max B n'a guère le loisir de sortir de véritable album. Son seul et unique, Vigilante Season, ne sera disponible qu'en 2011, après son incarcération. Pendant ce court laps de temps, toutefois, il enflamme le circuit des mixtapes avec les séries Public Domain et Million Dollar Baby. La dernière de ces années, 2009, se montre riche, avec les deux Coke Wave (des collaborations avec le Marocain de New-York French Montana), et deux nouvelles suites prisées à Public Domain, toujours avec DJ Big Mike : Quarantine, et ce Walking The Plank sorti juste après son jugement.

Avant un long silence forcé, Biggaveli (l'un des surnoms du rappeur, et la raison du "B" dans "Max B") délivre une dernière grande mixtape dans son style : un rap marmonné, mais insolent, consacré avant tout aux filles et au récit de ses exploits sexuels, et qui, au moment du refrains, est prompt aux chantonnements. La formule évoque celle que 50 Cent a popularisée quelques années avant, mais elle est déployée avec un plus grand systématisme, et son caractère mélodique est renforcé par des couleurs très soul, avec violons ("All In One Night", "Scream", "What You Want From Me"), chants lascifs ("Dirty South", "CT Bitches") ou en falsetto ("Moving On Out The Door"), et guitares langoureuses ("Cheaper To Keep Her", "Letter To Stack Bundles").

Cette fournée postérieure à la condamnation ajoute des titres d'anthologie au répertoire déjà conséquent de Max B : le menaçant, "Dead Solver", avec Mack Mustard, accompagné à propos de chœurs denses et pesants ; quelques autres manifestations réussies de ses collaborations avec French Montana, comme "CT Bitches" et le "Cake Remix" ; "Porno Muzik", romance d'un genre particulier où le rappeur semble confirmer qu'il n'y a pas de différence entre amour et pornographie ; et le mélodique "Letter To Stack Bundles", un hommage à son complice du ByrdGang tué en 2007.

Le grand moment, toutefois, c'est "I Never Wanna Go Back", un titre déchirant sur son refus de la prison écrit par Max B la veille du verdict cruel qui le condamnera au trou pour toujours ou presque, rétrospectivement les adieux de celui qui aurait dû être l'un des grands des années 2010.

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